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botanistes, unis aux Darwin et aux Candolle, lui présentèrent leurs hommages, et cet album, sur une plaque d’or, portait l’inscription suivante :

Celeberrimo indefessoque J.-E. Teysmann cum dimidium per sœculum Archipelagi indici thesaurum botanicum exploravit, mirantes collegœ.

Pour en arriver là, il fallait sans doute posséder des qualités hors ligne, et Teysmann en était véritablement doué. Homme de forte trempe, sous tous les rapports, il unissait, jusqu’à la fin de sa vie, à une grande énergie et à une vive intelligence, l’âpre désir de ne laisser échapper aucune occasion de s’instruire, d’étendre ses connaissances spéciales et surtout d’élargir ses vues.

De 1830 à 1837, on n’entend plus parler ni du jardin de Buitenzorg, ni de son jardinier en chef : le jardin botanique n’existant, pour ainsi dire, pendant cette période, que de nom, et le préposé considérant les dix premières années passées à Java comme des années d’apprentissage. Cependant ce fut pendant cette période, en 1837, que le gouvernement colonial prit une mesure qui devait amener par la suite les conséquences les plus heureuses. Le membre dirigeant d’une commission dite d’histoire naturelle, à qui revenait la direction scientifique de Buitenzorg, était alors Diard, de nationalité française, et ce fut lui qui appuya chaudement auprès du gouverneur la demande de M. Hasskarl, débarqué récemment à Batavia et en quête d’une position. Plaidant la cause de son candidat, Diard réussit à le faire nommer provisoirement jardinier en second, puis « botaniste » et chargé en cette qualité de l’arrangement systématique des plantes du jardin. L’idée de Diard, strictement exécutée par M. Hasskarl, contribue maintenant, plus encore que le grand nombre d’espèces cultivées, à la valeur scientifique du jardin. — Des groupes arborescens, de véritables « quartiers » composés des plus grands végétaux, furent ainsi distribués dans un ordre naturel, et pendant les cinq ans qu’il resta attaché au jardin, le « botaniste » put déterminer un grand nombre d’espèces et composer le second catalogue du jardin, publié en 1844 et comprenant près de 3,000 plantes, parmi lesquelles plusieurs entièrement nouvelles.

Diard et M. Hasskarl partirent en congé pour l’Europe, et Teysmann resta seul de nouveau et dans des circonstances bien difficiles, puisque, depuis le départ de Diard, le gérant du jardin botanique fut un militaire : l’intendant des palais du gouverneur-général. Cet arrangement insolite continua, et pendant une trentaine d’années des militaires eurent la direction de l’Hortus Bogoriensis. Dans de telles conditions, une nouvelle période de