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monde, qui certes n’avait que l’embarras du choix parmi les plus riches et les plus pittoresques contrées de l’Asie.

Karakoroum fut visité au XIIIe siècle par le célèbre missionnaire Rubruquis (ou plutôt Rubruk), que Mangou, descendant de Djinghiz, reçut avec bienveillance. Rubruk, qui a laissé une description détaillée, fort curieuse, de la ville, fut étonné d’y trouver un artiste français nommé Guillaume Buchier, qui avait splendidement orné l’un des palais d’été du khan.

Rubruk nous apprend les sentimens de tolérance religieuse qui caractérisaient le prince mongol, et il en rapporte l’exemple suivant. Lorsqu’au mois d’août, Rubruk franchit la chaîne de Khan-gaï, au pied de laquelle se trouvait Karakoroum, il essuya une violente tempête qui ne cessa de sévir dans la capitale de l’empereur mongol, et causa à celui-ci une grande frayeur ; mais au lieu d’en rendre responsable le prêtre chrétien, comme l’eût indubitablement fait tout souverain musulman, Mangou enjoignit à Rubruk d’adresser au dieu des chrétiens de ferventes prières pour apaiser l’orage.

Ces faits, comme plusieurs autres de la même nature, rapportés non-seulement par Rubruk, mais aussi par le missionnaire Plan Carpin, démontrent que les mobiles qui poussaient aux invasions les Arabes et les Mongols n’étaient pas les mêmes : les premiers étaient animés par le fanatisme religieux, et les derniers par l’esprit de pillage.

Du côté de l’ouest, et déjà confinant au Turkestan russe, la Mongolie se termine par une région déserte nommée Dzungarie. Elle ne s’élève guère au-dessus de 800 mètres, et descend au-dessous de ce niveau sur plusieurs points, particulièrement du côté du midi, où le lac Ebenor n’a que 227 mètres d’altitude, chiffre presque inconnu dans cette partie de l’Asie centrale.

L’argile du loess, mélangée de sable très fin et de calcaire de teinte grise ou jaune blanchâtre, constitue la majorité du sol de la Dzungarie. Cette masse argileuse est percée, comme une éponge, par de nombreux tubes ou pores, souvent revêtus d’incrustations provenant de plantes herbacées. L’eau et les vents amoncellent souvent ces dépôts en masses abruptes élevées, divisées en parallélipipèdes. Cette propriété de former en quelque sorte des falaises verticales, ainsi que la texture poreuse et l’absence de toute stratification, sont les traits caractéristiques du loess, on peut encore y ajouter le défaut de fossiles pélagiques, remplacés exclusivement par les animaux terrestres ou lacustres. Grâce à l’extrême ténuité de ses élémens constitutifs, et en partie à la présence de sels divers, le loess est généralement d’une grande