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duc de Clèves un simulacre de mariage, qui heureusement ne fut jamais consommé et permit à la princesse restée libre d’épouser, par suite de nouvelles combinaisons diplomatiques, Antoine de Bourbon, union d’où sortit Henri IV.

Marie de Lorraine récompensa la fidélité de Jacques Stuart et les services de son père et de son frère dans plusieurs combats contre les armées impériales. Elle dut se féliciter de la persistance de François Ier à la refuser au puissant roi d’Angleterre, lorsqu’elle vit Anne de Clèves répudiée après six mois d’union, Catherine Howard décapitée, Catherine Pair condamnée, et sauvée seulement grâce à la mort prématurée de ce roi chez lequel les vices croissaient avec l’âge.

Ce mariage dont Henri poursuivit pendant six mois la négociation n’avait pas été le premier qu’il eût désiré sans succès en France. Lorsqu’il avait voulu se séparer de Catherine d’Aragon, il avait fait demander par Wolsey la main de Madame Renée, fille de Louis XII et d’Anne de Bretagne, depuis duchesse de Ferrare ; mais comme elle avait par sa mère des droits au duché de Bretagne, François, convaincu que le roi d’Angleterre ne manquerait pas de les faire valoir tôt ou tard, refusa de lui accorder la main de cette princesse. Le nom de la veuve du duc d’Alençon avait aussi été prononcé ; mais, pour la Marguerite des Marguerites, pour la princesse « née d’une perle, » quel époux que ce roi voluptueux et sanguinaire ! La beauté d’Anne Boleyn tenta ses goûts, et la France conserva sa princesse si chère à tous.

François Ier, se rendant bien compte que les conditions du traité auquel on travaillait et qui allait être signé ne devaient pas satisfaire son bon frère, écrit à Castillon que tous les princes chrétiens en général étaient compris dans la trêve ; si le roi d’Angleterre trouvait étrange de n’avoir pas été spécialement dénommé et compris dans le traité, c’est que l’empereur voulait mettre avant lui le roi de Portugal et que, les députés ne pouvant s’entendre, on avait finalement fait « la compréhension générale ; » il donne de nouvelles assurances d’amitié et dit que rien ne lui sera plus agréable que de le voir prendre un parti en France.

Mais en ce temps où les moyens de communication n’étaient pas rapides, quoique les postes eussent été établies depuis près de quatre-vingts ans, au moment où François Ier écrivait ce qui précède, Henri ne croyait pas encore que l’entrevue de Nice pût amener un résultat, et Castillon rendait compte ainsi, le 19 juin, de cette manière de voir : « Maintenant que le roi est certain que la paix ne se fera pas, il montre des exigences plus grandes, il demande que le roi de France abandonne le pape. Sur l’observation que l’alliance entre