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Les caisses de la ville, 43 francs 80 centimes par an ; mais, par compensation, il est cchargé de la contribution mobilière, des 11 3/4 pour 100 qu’elle ajoute au chiffre de chaque loyer, des 11 3/4 pour 100 qu’elle eût ajoutés au chiffre : du sien, partant, si son loyer est de 400 francs, de 47 francs par an. Ainsi, ce qu’il a versé d’une main, il le reprend de l’autre. Or, à Paris, tous les loyers au-dessous de 400 francs[1] sont déchargés ainsi de toute leur contribution mobilière ; tous les loyers de 400 à 1,000 francs en sont déchargés plus ou moins, et, dans les autres villes à octroi, une décharge analogue rembourse aux petits contribuables une part plus ou moins grande de la somme qu’ils paient à l’octroi. — Ainsi, dans les villes comme à la campagne, ils sont épargnés, tantôt par allégement fiscal, tantôt par faveur administrative, tantôt par abandon forcé, tantôt par remboursement total ou partiel ; toujours, et très sagement, le législateur proportionne le fardeau à la force de leurs épaules ; il les soulage le plus qu’il peut, d’abord de l’impôt général, ensuite, et encore mieux, de l’impôt local. Par suite, dans la dépense locale, leur quote-part baisse au-delà de toute proportion et se réduit au minimum. Cependant, leur quote-part dans la jouissance locale demeure entière et pleine ; à ce prix infime, ils jouissent de toute la voie publique et bénéficient de toutes les précautions contre les fléaux physiques ; chacun d’eux en profite, pour sa personne, autant que le millionnaire pour la sienne. Ainsi chacun d’eux, pour sa personne, touche autant dans le dividende total de sûreté, de salubrité et de commodité, dans le fruit des énormes travaux d’utilité et d’agrément qui assurent les communications, préservent la santé, facilitent la circulation, embellissent la résidence, et sans lesquels, à la ville comme à la campagne, la vie serait impossible ou intolérable.

Mais ces travaux si dispendieux, ces appareils et opérations de défense contre l’inondation, l’incendie, les épidémies et les contagions, ces 500,000 kilomètres de routes vicinales et départementales, ces digues, quais, ponts, promenades et jardins publics, ce pavage, drainage, balayage, éclairage, cette conduite et fourniture de l’eau potable, tout cela est payé par quelqu’un, et, puisque ce n’est point par le petit contribuable, c’est par le contribuable gros ou moyen. Celui-ci porte donc, outre sa charge obligatoire, une surcharge gratuite, à savoir tout le poids dont l’autre est allégé.

Manifestement, plus il y aura d’allégés, plus cette surcharge sera lourde, et les allégés sont par millions. Deux millions et demi d’indigens avérés[2] sont déchargés de toute la contribution directe,

  1. Il s’agit, ici du loyer matriciel, lequel est au loyer effectif comme 4 est à 5 ; ainsi un loyer matriciel de 400 francs indique un loyer effectif de 500 francs.
  2. De Foville, p. 57.