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de haut enseignement, mais des jurys de baccalauréat. — Dans ce nombre, la Restauration tailla et abattit. De ces cinquante-quatre Facultés, dont quelques-unes n’avaient d’ailleurs existé que sur le papier, elle ne laissa debout que six Facultés des lettres et sept Facultés des sciences ; mais elle le fit arbitrairement, à l’aveugle, sans souci de l’avenir, sans trace de système, fauchant Lyon, Nancy, Montpellier, Rennes, Bordeaux, mais ne touchant pas, on se demande pourquoi, à Besançon et à Dijon. — De 1830 à 1848, on créa bon nombre de Facultés nouvelles ; il en était de nécessaires, qui répondaient à des besoins de l’enseignement et de la science. Par malheur, ce ne fut pas le cas pour toutes. Le procès-verbal d’une séance de la chambre des pairs, en 1844, en dit long sur cette affaire. On proposait d’abolir les jurys de baccalauréat, par lesquels la Restauration avait remplacé les Facultés supprimées. Un pair, son nom n’importe pas, combattait la mesure et demandait comment on s’y prendrait pour recevoir les bacheliers. « Soyez sans inquiétude, interrompit le ministre, M. de Salvandy, on multipliera les Facultés ! » — « C’est fort grave, cela, monsieur le ministre. » riposta Victor Cousin. — C’était grave, en effet. Ce fut fait, cependant. — Ce fut fait encore sous l’empire, en 1854. D’une seule fournée, on institua huit Facultés nouvelles, cinq pour les sciences, trois pour les lettres, et voilà comment, jusqu’à ces dix dernières années, un si grand nombre de nos Facultés étaient points morts ou languissans ; comment aussi, malgré tant d’efforts pour les animer, plusieurs ne sont pas encore bien vigoureuses aujourd’hui.

La République elle-même, malgré un souci éclairé des intérêts du haut enseignement, n’est pas sans reproche à cet endroit. Elle n’a pas fait, il est vrai, de nouvelles Facultés des lettres ou des sciences ; mais elle a fait cinq Facultés de médecine. Sur ce nombre, il en était d’absolument nécessaires. Mais les autres ? Je me contente de dire : attendons l’avenir. Cependant, un fait déjà m’inquiète. Nous avons aujourd’hui trois Facultés de médecine de plus qu’en 1876, et, au total, nous ne faisons pas, bon an mal an, beaucoup plus de docteurs en médecine. Et puis, je ne vois pas que la pléthore d’étudians qui encombrait l’École de Paris se soit beaucoup écoulée sur les Facultés de province.

Ainsi, toujours la multiplication outrée, la dispersion, l’éparpillement. Tout autres n’ont cessé d’être les vues des partisans de l’autre système, des universitaires, de ceux qui, avant tout et par-dessus tout, ont eu en vue la fonction scientifique et l’office éducateur de l’enseignement supérieur. Quelques centres seulement, mais forts et bien pourvus, voilà ce que toujours ils ont proposé,