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prêteurs, le taux officiel que sa situation, sa puissance, sa croissante prospérité, lui ont permis de réduire à un niveau de plus en plus bas.

Il faut dire à l’honneur de ce petit et moyen commerce qu’il a rendu toujours presque superflues, par sa rigoureuse probité, les précautions protectrices édictées par la législation. Le nombre des effets présentés à l’escompte et non admis est infime par rapport au total, et la plupart des effets rejetés ne le sont que pour des irrégularités de forme. Dans le rapport du 25 janvier 1872, le gouverneur, qui était alors M. Rouland, rappelant les difficultés de la tâche que les circonstances avaient imposée à la Banque depuis les derniers mois de 1870, disait : « Vis-à-vis du commerce et de l’industrie, il fallait prévenir les souffrances, les ruines, et faciliter par des mesures larges et bienveillantes, la liquidation des affaires engagées, aussi bien que la reprise du travail et des transactions… La Banque n’a pas failli à cette grande tâche de salut public, tout en sachant bien qu’elle s’exposait à de très graves éventualités. Heureusement sa confiance n’a pas été trompée. Le commerce français, modèle de sagesse et de probité, a pu rembourser la presque totalité de ses engagemens. » Un fait vraiment remarquable, c’est qu’avec ces chiffres énormes de plus de 12 millions d’effets admis à l’escompte pour un montant de plus de 9 milliards en une seule année, il n’y a pour ainsi dire pas de compte d’effets en souffrance à la Banque. Pour Paris, il en existait un qui a été fermé en 1888, le solde en était créditeur de 400,000 francs qui ont figuré dans les produits distribués. On en a ouvert un au début de 1889. Il présentait à la fin de l’année un solde débiteur de 151,000 francs. Dans les succursales, il y a un peu plus d’arriérés, 2,300,000 francs environ fin décembre dernier. Encore le rapport nous dit-il que la Banque considère comme à peu près certaine la rentrée de la très grande partie de ces créances.

Le rôle de la Banque grandit ainsi d’année en année, égal aux besoins croissans que développe l’essor extraordinaire de la fortune publique. Aussi y a-t-il une profonde injustice dans cette assertion tant de fois répétée, sous toutes les formes, que la Banque au point de vue de l’escompte n’est plus à la hauteur de la mission qui incombe à ce grand établissement. A un jugement si dédaigneux, nous opposerons le tableau suivant, qui permet, en comparant quelques chiffres à trois époques distinctes dans la seconde moitié du siècle, de constater si vraiment la Banque a oublié de marcher avec son temps. Nous nous bornons aux trois points suivans, la masse des opérations, le montant du portefeuille et celui de la circulation fiduciaire. (Les chiffres sont exprimés en millions de francs.)