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poraire a été toute-puissante : les rachats précipités d’un découvert abois, réduit à capituler. Il suffit de considérer comment la hausse a procédé. La dernière semaine de mai a vu le 3 pour 100 dépasser résolument le cours de 90 et s’avancer vers 91. La réponse des primes s’est faite à 90.92. Le cours de 91.40 a été fixé pour la liquidation, avec un report insignifiant de 0 fr. 02 à 0 fr. 03 ; et, quelques jours après, la rente arrivait à 92.50 et 92.70. On attendait une réaction après une poussée aussi violente. Elle est venue en effet, mais elle a duré deux jours et n’a ramené que pour un moment la rente entre 92.35 et 92.50. Puis le mouvement a repris, et le dernier cours est 92.80. Déjà le prix de 92 francs, ex-coupon, est acquis.

La poursuite d’un découvert n’est pas toujours la conséquence d’un plan préconçu et d’une volonté très arrêtée dans ses desseins. Elle est le plus souvent le déchaînement d’une force brutale. Il est bien certain que dans les hautes sphères financières, on avait préparé et machiné la grande hausse des fonds et des valeurs en vue de l’emprunt français de 700 millions et de diverses autres opérations d’une importance considérable. Les achats de rente pour le compte des Caisses d’épargne ont été un des moyens d’exécution de ce programme. Mais la hausse eût pu rester modérée, et cela eût été mieux ainsi. Les baissiers auraient dû comprendre les signes des temps, et voir que, toutes les places financières marchant depuis sept ou huit années de conversions en conversions, le taux de capitalisation suivait nécessairement les modifications de celui de l’intérêt. Le découvert s’est obstiné. Une liquidation est arrivée où une levée de boucliers des intermédiaires l’a forcé à abandonner toutes ses positions, à rendre la place à ses adversaires.

Le résultat est qu’il n’y a plus de découvert (peut-être cependant s’en forme-t-il déjà un nouveau), que l’épargne commence à ralentir ses achats, que les cours nouveaux étonnent et mécontentent les capitalistes qui ont des placemens à effectuer et que ces cours vont peut-être sembler un peu difficiles à soutenir dans l’attente de l’emprunt de 700 millions dont le principe a été voté par la commission du budget.

Ce grand mouvement du 3 pour 100 français a été accompagné d’une fusée générale de hausse sur les autres valeurs. Les plus favorisées de ces dernières ont été la Banque ottomane et tout le groupe turc, l’Extérieure, les actions de nos grandes compagnies de chemins de fer, le Nord surtout, et les Chemins autrichiens.

Le Crédit foncier a baissé un moment jusqu’à 1,170. Mais de vigoureux rachats l’ont relevé à 1,240. Les attaques dirigées contre cet établissement ont à peu près épuisé tout leur effet.

Les fonds étrangers ont été portés comme les rentes françaises à un niveau si élevé que la spéculation à la hausse éprouve maintenant quelque peine à les y maintenir. L’Italien, sous le coup des rachats du