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pas le cas d’en augmenter artificiellement le prix. Les agriculteurs nous disent qu’ils vendent mal leurs bestiaux sur les marchés et que la hausse de la viande provient des bénéfices exagérés que s’attribuent les intermédiaires, les facteurs et les bouchers. Cela ne regarde pas le consommateur. C’est affaire aux fermiers de veiller à une organisation meilleure de leur commerce et à la défense de leurs intérêts. On nous accable de statistiques qui tendraient à prouver que la viande de boucherie a été plus chère quand les bœufs étaient à peine taxés, et moins chère, avec des tarifs élevés. Ces statistiques-là devraient être prohibées. A qui fera-t-on accroire qu’à moins de circonstances très exceptionnelles, une taxe ajoutée au prix vénal d’un produit n’opère pas dans le sens de la hausse ? C’est précisément pour déterminer la hausse à l’intérieur ou pour arrêter la baisse que les droits de douane sont si ardemment sollicités. Tous les raisonnemens invoqués en cette matière, les bons comme les mauvais, sont primés par la question des subsistances.

La commission ne se borne pas à surtaxer les bœufs. Elle surtaxe également les vaches, les veaux, les moutons, les agneaux, les chèvres, les porcs, les cochons de lait, le gibier, les tortues, les volailles, les pigeons qui viennent, dit le rapport, « concurrencer un des produits de la ferme française, » les chiens de chasse et d’agrément. Il y a pourtant exemption de droits pour les animaux non dénommés dans cette nomenclature qui ressemble à un catalogue du Jardin d’acclimatation ; mais l’exemption n’est pas définitive : « L’administration des douanes sera chargée de dresser un <état de ces animaux par espèces, afin de présenter le chiffre exact de ceux qui peuvent concurrencer les produits de l’agriculture française. » — Aux animaux vivans succèdent les animaux morts et leurs dépouilles. Les viandes fraîches de bœuf acquittent aujourd’hui à l’entrée, en vertu du tarif conventionnel, un droit de 3 fr. par 400 kilogrammes. Le tarif général de 1881 les a taxées à 12 francs, le gouvernement propose, en 1891, le droit de 20 francs, et la commission le hausse à 25 francs. De même pour les viandes fraîches de porc et de mouton. Le mouton est particulièrement protégé, le droit qui le concerne atteignant dans le projet de la commission 32 francs par 100 kilogrammes, soit 0 fr. 32 par kilogramme. Et cela, dit le rapporteur, « pour tenir compte, dans une juste mesure, des diverses indications qui ont été fournies par les intéressés et des plaintes très légitimes des industries en cause. » Le tarif des conserves de viandes en boîtes passerait de 8 francs à 15 et 20 francs, celui des conserves de gibier, de 15 et 20 francs proposés par le gouvernement à 60 et 75 francs adoptés par la