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du 26 mars, sans débattre la moralité des Italiens exécutés, maintient que les prisonniers enfermés dans la prison d’un état régulier ont le droit d’être défendus et que, sans aucun doute, des prisonniers reconnus innocens par la justice régulière ne l’ont pas été. » Rien de plus simple. Ce qui peut légitimer une exécution capitale, c’est une condamnation prononcée dans les formes requises par un juge appliquant la loi. Qu’est-ce qu’une exécution non précédée d’un jugement ? Un homicide volontaire, aggravé par la préméditation, c’est-à-dire un assassinat. Il s’agit donc uniquement de savoir si, dans l’état actuel des relations internationales, une puissance, informée que plusieurs de ses nationaux viennent d’être exécutés sans jugement, a le droit de demander des poursuites effectives contre les exécuteurs et de réclamer une indemnité pour les familles des victimes.

M. Blaine a répondu, le 14 avril, par une dépêche 1res habile et très complète à la note remise douze jours plus tôt par le chargé d’affaires d’Italie au gouvernement fédéral. L’éminent secrétaire d’État fait d’abord observer qu’un traité de commerce et de navigation, du 26 février 1871, lie les deux puissances. Il ne demanderait pas mieux que d’accueillir les réclamations fondées sur une clause de ce contrat. Mais où trouver cette clause ? Le traité dit sans doute : — « Les citoyens de chacune des hautes parties contractantes recevront dans les états et territoires de l’autre la plus constante protection pour la sécurité de leurs personnes et de leurs propriétés, » et M. di Rudini se prévaudra bientôt de cette disposition dans une note adressée, le 28 avril, au marquis Imperiali. Mais cette garantie est accordée, d’après M. Blaine, à des conditions restrictives qui paraissent en annuler l’effet dans le conflit actuel : — « Les États-Unis, lit-on dans la dépêche du 14 avril, ne se sont point constitués par le traité de 1871 les assureurs de la vie ou de la propriété des sujets italiens résidant sur les territoires. » — En dépit de quelques réticences, il semble bien que le cabinet de Washington aboutisse à cette conclusion : — « Hors d’un pacte formel, nous n’avons pas de devoirs internationaux à remplir envers les Italiens. » — C’est aller vite en besogne. M. Blaine raisonne comme en matière d’extradition ; mais ne confond-il pas ainsi deux choses distinctes ?

M. Billot a très exactement défini l’extradition « l’acte par lequel un état livre un individu, accusé ou reconnu coupable d’une infraction commise hors de son territoire, à un autre état qui le réclame et qui est compétent pour le juger et le punir. » Or un certain nombre d’illustres jurisconsultes : Klüber, Martens, Fœlix, Phillimore, sir Travers Twiss, Heffter, enseignent, soit que