Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 105.djvu/672

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour les études rustiques et plébéiennes, en plein air, elles sont, comme d’habitude, extrêmement nombreuses, et nous ne pourrions même énumérer celles qui présentent de l’intérêt par quelque côté. Les unes se rattachent plus, par la sobriété nette du rendu, par l’expression fine d’un sentiment poétique, à l’école de M. Jules Breton; telles sont, entre autres, le Soir d’été de M. Adan ; les Vendanges et Après le grain de M. Adrien Moreau; l’Attente de M. Guillou ; le Départ et le Retour de M. Denneulin; les Vieux de M. Maroniez ; la Collation et Allant aux champs de M. Brözik; les Jeunes bœufs de M. Debat-Ponsan. La grande toile de M. Chigot, Perdus en mer, est conçue dans une intention plus dramatique; la peinture en est un peu pénible, mais la composition est émouvante et le mouvement des vagues puissamment rendu. D’autres, dans lesquelles l’esprit de composition est moins visible, et l’impression éprouvée devant la réalité plus immédiatement traduite, rappellent plus, par la liberté, la largeur et souvent aussi la négligence et la lourdeur de leur facture, les procédés en usage chez les Hollandais et certains Allemands; ce sont presque tous des ouvrages dus à des étrangers ; tels sont les Bons voisins et les Vieux par M. Carpentier, un Belge ; l’Enterrement à bord, un morceau franc et émouvant par M. Brangwyn, un Anglais; l’Hospice des vieillards à Bruxelles par Mlle Heyermans ; la Lettre de Jacques et les Adieux, par M. Penfold, un Américain. La vie parisienne a iourni des sujets de spirituelles études à M. Gilbert (l’Heure du repas, quartier du Temple, un des tableaux les plus finement observés et les plus finement peints qu’il ait encore faits) et à M. Gelhay (le Moulin Rouge avant la matinée). Plusieurs de nos peintres ont aussi rapporté de l’étranger des souvenirs intéressans; nous indiquerons seulement, pour l’Algérie, M. Bompard et M. Paul Lazerges, pour la Moravie, M. Gueldry, pour l’Italie, M. Saint-Germier, pour l’Espagne, M. Mélida, et toujours pour l’Egypte, M. Gérôme, avec son Coin du Caire et son Lion aux aguets. Le premier tableau est un panorama de coupoles, de minarets, de toits et de terrasses, le second est un panorama de montagnes sèches et d’horizons pierreux ; dans tous les deux c’est une science surprenante pour accumuler, à leur juste place, sur un petit espace, une multitude incroyable de détails architecturaux ou géologiques, sous une fine et pénétrante lumière, avec une infatigable précision.


III.

Les deux genres dans lesquels nos peintres réussissent le plus fréquemment sont les deux genres qui s’inspirent le plus directement de la nature, le portrait et le paysage. Pour les peintres de