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et colorée, dans laquelle le peintre-sculpteur, en train de peindre une statuette, est fort bien saisi dans la vivacité d’une attitude familière ; celui de M. Falguière, par M. Calbet, d’une vérité non moins frappante et d’une facture aisée ; celui de M. Luminais, par M. Pierre de Bengy, très ressemblant et d’une bonne couleur ; celui de M. Pelouse, par M. Foubert, exact et consciencieux ; et, enfin, dans de plus petites dimensions, placés dans leurs ateliers, au milieu de leur entourage habituel, ceux de M. Geoffroy Dechaume, par M. Frank Bail, une très jolie étude d’intérieur ; de M. Détaille, par M. Lemeunier ; de M. Étienne Leroux, par son fils Eugène Leroux ; mais il nous semble que, dans aucun, le type même du personnage n’a été analysé avec plus de finesse et de profondeur que celui de M. Bonnat par le vénérable M. Jean Gigoux.

Le portrait en pied de S. É. le cardinal Bernadou, archevêque de Sens, par M. Delaunay, est à la fois un morceau rare de belle peinture et une excellente représentation individuelle. Le cardinal, en vêtemens rouges, tenant sa barrette dans les mains, marche sur un tapis rouge, devant un fond de tapisserie armoriée. Le visage, coloré sous les cheveux gris, jette une note éclatante de plus dans ce concert de rouges hardis et savamment mariés. L’attitude, le geste, la physionomie, sont également décidés et puissans. L’ampleur ferme du coup de pinceau correspond à la solennité virile du personnage. Il y a beaucoup d’autres portraits en pied, quelques-uns fort habilement traités ; mais dans la plupart le faire reste un peu mince ou sec pour la dimension de la toile. Il faut néanmoins mettre à part, d’abord le beau Portrait d’un président de la Cour de cassation, par M. Baschet, dont la tête et les mains, ainsi que la robe, sont traités avec une fermeté grave qui rappelle Philippe de Champaigne ; celui de M. C.., par M. Humbert, sommairement, mais largement peint, le Portrait équestre de M. Smith, par M. Guthrie, moins remarquable pourtant que son portrait assis du Docteur Gardiner. celui d’un bohème décoré dans une rue de Paris,… X, par M. Thévenot ; celui surtout de M. le prince de B.., un officier supérieur à la tête énergique et fine, d’une physionomie à la fois fière et douce, tenant la main sur la poignée du sabre, par M. Paul Dubois. Comme dans tous les portraits si modestement présentés du grand artiste, c’est la tête encore qui domine tout dans celui-ci. Cette figure serait inoubliable si, à deux pas, dans un tout petit cadre, M. Paul Dubois ne faisait saillir, avec une verve plus surprenante encore, la physionomie ardente et vive du Docteur Lannelongue, avec ses joues colorées, ses lèvres sanguines, ses yeux noirs perçans, sa chevelure grisonnante en brosse, dans sa robe de professeur. Voici encore un jeu de rouges sur rouges conduit avec une