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sont exécutées, dans un bon style classique, avec une franchise très sculpturale. Il suffirait à l’artiste de pousser un peu plus le travail du marbre, en quelques parties, notamment dans l’enfant nu, debout, près de l’Alsace, pour donner toute sa valeur à cet intéressant morceau. C’est aussi l’Alsace que M. Gustave Michel a évoquée dans Souviens-toi, non plus une Alsace allégorique, mais une Alsace vivante et réelle, qui sous les traits d’une grande paysanne, dans son costume national, vient de gravir la cime d’une montagne et, de là, montre du doigt l’horizon à un jeune homme, vêtu aussi d’un costume alsacien, qui l’accompagne en la suivant. Il semblerait, au premier abord, qu’un tel sujet ne comportât guère que les dimensions de la sculpture anecdotique ; cependant M. Gustave Michel a osé donner à ses figures des dimensions colossales, et on ne saurait le lui reprocher, car en même temps qu’il les agrandissait matériellement, il les agrandissait moralement par la force simple et puissante de l’émotion dont il les remplissait, par la grandeur qu’il savait mettre dans la fermeté de leurs attitudes, dans la discrétion de leurs gestes, dans le jet de leurs vêtemens. Le Souviens-toi est une œuvre profondément sentie qui ne tardera pas à devenir populaire.

Pour en finir avec les gros morceaux de sculpture, il nous reste à signaler, parmi les effigies historiques, la statue équestre du Général Lassalle, comte de l’empire, par M. Henri Cordier, ouvrage audacieux et brillant, le groupe de Danton, appelant le peuple aux armes, entre un volontaire battant du tambour et un gamin coiffé du bonnet phrygien qui l’acclame, bronze commandé à M. Auguste Paris pour le monument de Danton à Paris, la statue en bronze de Lazare Carnot, par M. Delhomme, pour la ville de Carnot, en Algérie. Tous ces ouvrages méritent sans doute l’attention, ainsi qu’un certain nombre d’études mythologiques ou naturalistes qu’il nous est impossible d’examiner en détail, tels que l’Orphée, de M. Paul Aubert, le Martyre, statue en bois de M. Armand Bloch, l’Encélade foudroyé de M. Muhlembeck, le Génie de la sculpture, par M. Davis, le Premier artiste, par M. Richer, la Jeunesse et l’Amour, par M. Chrétien, la Naïade, par M. Hercule, l’Amphitrite, par M. Ludovic Durand, la Première révélation, par M. Foretay, la Jeune femme jouant sur une tortue, par M. Seysses, etc.

Nous avons hâte d’inviter nos lecteurs à examiner de plus près deux séries d’objets de dimension moindre, mais dans lesquelles nos artistes déploient un talent de plus en plus remarquable, les bustes et les médailles. Rien de plus ennuyeux que la description d’un buste ; rien de plus amusant et de plus instructif à regarder lorsque l’artiste n’est pas seulement un habile pétrisseur de terre,