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par l’étude, la volonté, l’expérience. Son Portrait de M. C, professeur en robe rouge, assis dans un fauteuil, vu à mi-corps, est une savante et belle peinture, d’une exécution ferme et virile. La netteté de l’attitude, la simplicité noble du visage, la disposition aisée des vêtemens, la vérité des mains, la belle conduite du tout, tant pour les dessous que pour la surface, tant pour la couleur que pour le dessin, en font une œuvre de durée qui survivra à la mode. M. Parrot affirme d’ailleurs, tout à côté, ses convictions dans une étude de Bacchante endormie sur le gazon, fortement modelée et vigoureusement peinte, dans laquelle le peintre révèle ses sympathies pour le moins nuageux et le plus sain des peintres, Rubens.

Il serait injuste de dire que MM. Roll, Gervex, Duez et plusieurs de ceux qui les suivent ne sont pas également des peintres sains et bien portans, car ils doivent précisément leur juste réputation à l’entrain de leur coup de brosse, à la franchise et souvent à l’éclat de leur peinture, à leur goût pour les colorations fraîches et vives dans une atmosphère limpide et ensoleillée. Seulement, ils semblent, depuis quelque temps, compromettre à plaisir toutes ces belles qualités par un laisser-aller tellement visible dans leurs œuvres hâtives, qu’on n’y trouve souvent pas plus de moelle que dans les esquisses des intentionnistes et des impressionnistes, avec lesquelles ils n’ont pourtant aucun rapport. M. Roll expose sept portraits, M. Gervex cinq, M. Duez se contente de deux, et peut-être ses confrères auraient-ils bien fait d’imiter sa discrétion. En réalité, avec deux ou trois œuvres bien choisies, un peintre se montre avec plus d’avantage que lorsqu’il entoure ces œuvres achevées de toutes sortes de préparations plus ou moins heureuses, dans lesquelles se révèlent à plein ses insuffisances et ses défauts par leur répétition continue. M. Carolus Duran lui-même, l’un de ceux qui résistent le mieux à ce surmenage, aurait pu réduire le nombre de ses envois sans que son succès fût moins réel. Ne jugerions-nous pas plus favorablement M. Roll si nous ne voyions que Jeunes filles, Thaulow et sa femme, bien qu’aucune de ces études, en buste, brossées avec verve et résolution, ne soit un portrait poussé à fond ? Ce que M. Roll possède de franchise et de belle humeur, son sentiment très vif des colorations fraîches, visages et vêtemens dans la verdure fraîche, son intelligence cordiale des physionomies ouvertes et affectueuses, des visages fermes et francs, son habileté à éclairer hardiment les chairs en pleine lumière, tout ce qui fait de M. Roll un initiateur hardi et utile, se trouve suffisamment marqué dans ces deux peintures, du moment que l’artiste, occupé de grands travaux, ne pouvait nous donner