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UN
ENSEIGNEMENT NOUVEAU

Voilà donc encore un changement grave dans notre enseignement public ! Je connais bien des gens qui seront disposés à s’en plaindre. On fait aujourd’hui à l’université deux reproches tout à fait contraires : tandis que les uns l’accusent d’être routinière et de ne pas suivre assez docilement les progrès du siècle, d’autres lui en veulent mortellement d’abandonner les traditions anciennes et de faire trop de concessions à l’esprit nouveau. Je crains bien que, depuis quelques années, nous n’ayons donné à ces derniers trop de raisons d’être mécontens. C’est un grand danger de modifier sans cesse les programmes de nos écoles : on fatigue les élèves, on déconcerte les professeurs, on irrite les familles, on trouble l’opinion, en passant aussi brusquement d’un système à l’autre, et en condamnant le lendemain ce qu’on approuvait la veille. Tout ce qu’on peut dire pour défendre l’université, c’est que, si le mal est réel, il n’est pas nouveau ; voilà plus de quarante ans que nous en souffrons. Depuis l’essai malheureux et maladroit que fit M. Fortoul du régime de la bifurcation, il ne se passe guère d’année où l’on ne tente quelque réforme qui sera supprimée ou modifiée l’année suivante. Il n’est donc pas juste de prétendre, comme on le fait, que cette épidémie d’innovations ne date que de 1880. Elle est l’indice d’un malaise qui remonte plus loin ; et, si, dans ces dernières années, les changemens ont été plus