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Sémélé, appelé au commandement d’une division. Il m’exhortait à la patience, me disant que l’échange proposé par les Anglais était accepté, et que M. de Casa-Trevino était attendu au quartier-général français.

Le 15, M. Right, officier attaché à l’état-major anglais, qui avait été fait prisonnier par les Français près de Tariffa et rendu de suite, vint me voir. Il m’assura que le marquis de Casa-Trevino était attendu par les Français ; que cet officier était à Madrid, et qu’il se louait beaucoup des bons traitemens qui lui avaient été prodigués.

Je repris un peu courage. L’année 1812 allait commencer.


1812.

Le 25 janvier 1812, M. Harpour, officier anglais du 67e régiment, avec qui je m’étais lié d’amitié, vint me voir et me dit que M. Archdeakon, vice-consul anglais, était parent du marquis. Je lui écrivis pour lui demander de ses nouvelles. Il me répondit que cet officier était encore, le 25 novembre, à Madrid, malade, et qu’il ignorait qu’il dût être échangé contre moi. J’écrivis encore au quartier-général du 1er corps pour accélérer mon malheureux échange.

Je fus privé, à cette époque, de la société des officiers du 67e régiment anglais. Ce corps partit de Cadix pour Valence, que les Français assiégeaient, avec ordre de se rendre à Carthagène s’il trouvait, à son arrivée, la place de Valence prise.

Le 5 février, l’abandon auquel je me trouvais réduit, ne recevant plus de réponses aux lettres que j’adressais au quartier-général, le peu d’espoir que je conservais encore d’obtenir ma liberté après avoir supporté tant de dégoûts et de privations, dépensé tant d’argent, ces ennuis, réunis au chagrin de me voir renfermé comme un malfaiteur, me donnèrent la fièvre, qui me contraignit de rester couché.

Afin de conserver toujours le souvenir de ma prison, je vais la décrire ici.

La casemate où j’étais renfermé est située à la caserne de la porte de terre, à Cadix, pavillon Sainte-Hélène, n° 6. Ma chambre, recouverte par une voûte basse, ressemblait à une cave. On y voyait une sorte d’alcôve dans laquelle était un pliant (lit de sangles) que j’avais rapporté de l’île de Léon ; c’était mon lit. Il supportait une très mince paillasse et deux gros draps d’hôpital. Il était mon unique meuble. Nous y ajoutâmes, plus tard, un petit banc et une espèce de table fabriqués par mon domestique avec du bois de