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le bonhomme, et l’expédition finit par découvrir trois vaches superbes, tondant paisiblement l’herbe fleurie et qui s’interrompent de paître pour lever leurs grands yeux humides sur ces hommes irrités. Il faut en finir, on secoue le débiteur : « Payez-vous? — Je paie, » et on revient à la maison pour compter l’argent. Mais 10 schellings manquent et sur la remarque qu’en fait le receveur, le fermier déclare qu’il les retient, que c’est une amende qu’il inflige à ceux qui traversent, sans autorisation, ses propriétés. Il n’y avait pas de sentier, il le répète, donc la force publique était dans son tort. Et il déploie une érudition extraordinaire, cite des articles de loi dont personne n’a jamais entendu parler. Peut-être aurait-on fait droit à ses prétentions si par leurs rires étouffés les assistans n’en avaient trahi la faiblesse. Il fallut bien que l’humble pièce allât grossir le tas d’or qui brillait déjà sur la table et ainsi se termina la comédie. Mais que ces conflits périodiques, où la farce a moins de part que les larmes, puissent se perpétuer sans inconvéniens, nul ne l’admet et ne le pense parmi ceux que n’aveugle pas l’intérêt.


III.

Il faut conclure. Que perdrait l’église d’Angleterre si le pouvoir législatif, usant du droit incontestable qui lui appartient, se prononçait pour la séparation et affranchissait la principauté du fardeau des quatre diocèses? Elle serait privée de ce que lui rapportent les comtés gallois, c’est-à-dire des 260,000 livres sterling dont nous avons indiqué plus haut la provenance. Certes, le coup serait rude, le sacrifice douloureux à supporter et on comprend à merveille que le clergé s’efforce de conserver ses positions, avec le libre usage des richesses dont ses ennemis ont formé le dessein de tarir la source. Et cependant il lui resterait en Angleterre de si belles compensations que ses plus chauds partisans eux-mêmes y regarderaient à deux fois avant de le plaindre. Il n’y a guère plus de quelques semaines qu’un document du plus haut intérêt, et dont le public a accueilli l’apparition avec une curiosité bien légitime, a été livré à la malignité des uns et à l’admiration respectueuse des autres. Lorsque dans le rapport publié le 30 juin 1891 par ordre des ecclesiastical commissioners on a pu lire que l’Église anglicane jouissait de 5,753,557 livres sterling de rente, ou 143,838,925 francs, que sur ce revenu considérable, 284,386 livres seulement provenaient de libéralités privées et 5,469,171 d’anciens douaires, alors les appréciations des amis et des adversaires se sont ressenties des sentimens contradictoires que leur inspiraient ces