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dans les caisses des banques et du trésor, n’est que de 591 millions[1].

Les banques d’escompte et de spéculation sont toutes dans une situation qui est loin d’être satisfaisante. Elles aussi se sont laissé entraîner à soutenir des entreprises de spéculation pour constructions dans les villes, à soutenir des établissemens protégés par le gouvernement, à escompter du papier de peu de valeur, soit par l’appât du gain, soit pour s’assurer les bonnes grâces du gouvernement; et maintenant elles se trouvent grevées d’engagemens qui dépassent leurs forces. Les actions du Crédit mobilier, qui étaient cotées à 1,012 francs en décembre 1887, sont tombées à 375 francs. Celles de la Banque générale, de 680 francs, tombent à 288 francs !

M. Bodio, a calculé les réductions qu’ont subies, du 31 mars 1887 au 31 mars 1891, les valeurs des actions des principaux établissemens de crédit, des sociétés industrielles, des chemins de fer, etc.; on voit par ces calculs la baisse énorme qu’a soufferte la richesse mobilière de l’Italie[2]. M. Carlo Bonis a calculé la perte qui en est résulté pour 23 des principales sociétés, et il arrive au total de 609 millions. Si l’on tenait compte de toutes les sociétés et de toutes les entreprises privées, la perte serait évidemment beaucoup plus grande.

Une douloureuse conséquence de cet état de choses, c’est l’augmentation du nombre des faillites, qui en 1886 furent au nombre de 1,310 et en 1889 de 2,015[3]. Les pertes des créanciers furent de 29 millions en 1886 et de 69 en 1889[4].

Pendant que le pays s’appauvrissait de la sorte, l’État augmen- tait considérablement ses dépenses[5]. Et c’est là une conséquence de cette politique qui s’obstine à nier les vérités les plus évidentes, et prétend imposer le mensonge au nom de la patrie. Le pire ennemi de son pays, c’est l’homme qui, voyant la vérité, n’a pas le courage de la dire, dans la crainte de compromettre les intérêts d’un

  1. 409 millions dans les caisses des banques, 9 millions, reliquat de l’emprunt de 644 millions pour l’abolition du cours forcé, 173 millions qui constituent un fonds propre du trésor de l’État.
  2. Bodio, loc. cit., p. 95-96. Les calculs sont faits sur le capital versé. Voici quelques-uns de ces chiffres. Valeur au 31 mars 1891, pour 100 de la valeur au 31 mars 1887 : Banque nationale, 72; Banque générale, 35; Crédit mobilier, 45; Crédit méridional, 13; Caisse d’escompte, 29; Banque d’escompte et Soie, 19; Esquilino, 0.68! Foncière italienne, 3; Eau Marcia (Rome), 51; Société immobilière, 20. Et la baisse continue encore!
  3. 1,623 en 1887, 2,200 en 1888.
  4. 85 millions en 1888. (Bodio, loc. cit., p. 97.)
  5. Ce sujet a été traité théoriquement d’une manière fort claire par M. le professeur Mazzola, I dati scientifici della finanza pubblica.