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ce puissant monarque n’était encore que roi de Castille, Philippe de Clèves, seigneur de Ravenstein. — « Vous fault partir votre navyre en quatre et en chacun quartier faire ung chief des plus gens de bien que vous ayez. » Cette division de l’équipage en quatre fractions égales destinées à se succéder dans le service de jour et de nuit s’est perpétuée jusqu’à nos jours, tant elle a paru rationnelle.

Un capitaine, nommé par l’amiral, exerçait à bord du vaisseau l’autorité suprême. Il recevait par mois, en l’année 1555, 30 florins de solde (67 francs), à peu près. Pour le seconder, ce capitaine avait un lieutenant, — un stathouder, — aux appointemens mensuels de 24 florins (54 francs.) Il avait également sous ses ordres deux patrons, des timoniers, des pilotes, des Esquimaux.

Les manœuvres se commandaient généralement au sifflet. En l’année 1523, on voit l’amiral Adolphe de Bourgogne faire délivrer à son vice-amiral Dirk van der Meer une certaine somme d’argent « qui sera consacrée, écrit l’amiral, à l’achat d’un sifflet d’or. »

Restée longtemps fidèle aux types que lui avaient transmis les Normands et les Vénitiens, l’architecture navale s’empressa, dès que l’adoption de la boussole lui eut ouvert l’accès des mers lointaines, de remplacer les cocche par les hourques, les drakars par les caravelles. Ce sont des caravelles qui découvriront le Nouveau-Monde. D’où est venu ce nom de caravelles ? D’un procédé nouveau dans la manière d’assembler les bordages, si nous en croyons les savans hollandais. Karvelwerken signifie encore dans la langue des Pays-Bas : « Border un navire de telle façon que les bordages chevauchent l’un sur l’autre. » Il nous en est resté les constructions à clins.

Sur les eaux intérieures, on continua, même après le développement prépondérant pris par la marine à voiles, d’employer, sinon de véritables galères, au moins des bâtimens à rames. Pour la navigation pratiquée en haute mer, la grandeur des carènes s’accrut, en quelques années, dans une proportion notable. Aux vaisseaux de 160, de 180, de 200 tonneaux, ont succédé des navires de 300, de 400, de 500, de 600 tonneaux même. Les navires à voiles n’avaient primitivement que deux mâts ; on leur en donne trois, sans compter le mât de beaupré.


II

Je vous ai montré l’instrument des luttes futures ; il ne sera pas, si j’en juge d’après mes goûts, inutile de vous décrire sommairement le théâtre sur lequel ces luttes vont avoir lieu.