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kilomètres de frontière, et la garnison du protectorat ne dépasse pas encore ce modeste chiffre. Mais, se dit-on, les Allemands auront des difficultés, ils en ont dès aujourd’hui ; certaines populations les repoussent ; ils prendront tôt ou tard de nouveaux contacts, ce qui probablement éveillera des conflits : de fil en aiguille, qui sait, ils finiront peut-être par entretenir dans ces contrées une force respectable, ils recruteront des troupes indigènes, et, alors, nous aurons toujours là, près de nous, quelque chose de gênant, avec un simple cours d’eau pour nous en séparer. Gardons-nous bien de céder la baie Valfich, puisqu’elle nous reste. Aussi longtemps que nous tiendrons cette enclave, nous serons les portiers du fâcheux protectorat, et, pour y monter commodément par l’escalier principal, du niveau de la mer, il faudra nous crier : cordon, s’il vous plaît !

Excessives ou non, pareilles craintes menaient à penser que ce serait peu de fortifier la côte ou quelques places de la côte. Puisons dans le journal précédemment cité un nouvel extrait. « Cape-Town, disait le Zuid-Afrikaan, est le siège du gouvernement, mais non, pour nous, comme Paris pour la France. Et cependant, le blocus de Paris n’a pas empêché un gouvernement de se reformer ailleurs… La prise de Cape-Town n’entraînerait pas une révolution, et, si elle semblait inévitable, il appartiendrait à notre gouvernement colonial de prendre position en quelque autre endroit pour ne pas laisser l’ennemi se mouvoir à l’aise sur le reste du territoire… Qu’on presse donc la mise en état des forts de la péninsule, nous serons loin d’y contredire. Ce qu’il convient toutefois que l’on sache, c’est que, Cape-Town occupé, il y aurait encore une colonie, et qu’elle ne se soucie nullement de tomber au pouvoir de la première puissance venue. Aussi voudrions-nous voir poser une autre question encore : notre gouvernement a-t-il à l’étude d’autres plans de défense que ceux qui concernent la presqu’île du Cap ? »

Cette idée qu’on se forme d’une convoitise toujours aux aguets et d’une sorte de fascination exercée par soi-même paraîtra, sans doute, exagérée. Mais après cela chacun se demande en quoi consistent actuellement les moyens de défense de la colonie autonome.


Le littoral est ouvert à tout venant, sauf en deux points de la presqu’île qui se termine par le cap de Bonne-Espérance. Du côté regardant l’Atlantique, la baie de la Table, avec Cape-Town au fond, a été pourvue d’ouvrages à peu près achevés ; on y a mis une artillerie assez puissante pour empêcher un bombardement. Au pied