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franchise. Les gens d’église et la noblesse protestèrent : on passa outre. On proclama, par suite d’une ancienne et invétérée coutume, qu’aucune confiscation de biens, sauf le crime de lèse-majesté, ne pourrait avoir lieu dans, le duché de Berry. La noblesse protesta encore, mais vainement. Celle-ci et le clergé restèrent responsables, mais en se rebiffant, des sentences de leurs juges. Le franc-alleu du Berry, ou la liberté assurée ; aux héritages roturiers, fut solennellement consacré de droit, mais non sans une forte opposition ; heureusement que la cour de Bourges n’hésita jamais à proclamer le franc-alleu comme l’ancien droit de la province.

Le rachat, c’est-à-dire le droit que le vassal devait payer au seigneur à chaque mutation, de fief, fut l’objet d’attaques très vives ; le clergé, devenu acquéreur de biens immenses, s’y refusait ; on l’y contraignit, et la noblesse et le tiers-état se liguèrent cette fois pour qu’il en fût ainsi. Le 30 octobre, les États assemblés déclarèrent que les coutumes telles qu’elles avaient été rédigées étaient bonnes et valables. François Ier demanda aussitôt au parlement de Paris de procéder à leur enregistrement et promulgation, ce qui fut fait. En résumé, modification des anciennes règles d’après le droit commun et addition de dispositions nouvelles.

Avec les idées de progrès qui se produisaient dans toutes les classes, la coutume écrite ne fut bientôt plus suffisante ; il fallut y ajouter des ordonnances qui furent l’objet d’études approfondies de la part des plus grands jurisconsultes de France. L’unité dans la législation ne se produisit que lors de la promulgation du code Napoléon, lequel devait résumer en son ensemble et l’expérience acquise et les leçons du passé.


XI. — LA PESTE DE 1580, HENRI IV EN BERRY.

Ce fut une autre Marguerite, Marguerite de France, qui, à la mort de la sœur de François Ier, reçut d’Henri II l’usufruit du duché de Berry. Ainsi que la reine de Navarre, dont l’esprit charmant se plaisait à de poétiques entretiens, la nouvelle duchesse protégea les lettres et l’université ; conseillée par l’illustre Michel de L’Hospital, elle fit tout au monde pour rendre le Berry prospère. Elle ne réussit pas à y faire refleurir l’industrie des draps, autrefois célèbre dans toute l’Europe, draps tellement bons qu’un vêtement fait avec eux passait en héritage des enfans aux neveux au point d’en ennuyer les heureux possesseurs. La noblesse accordée par Louis XI aux manufacturiers devenus maires et échevins en fut, ainsi que je l’ai dit, le principal empêchement. C’est Châteauroux