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premier ni le second inventaire, ce qui est tout autre chose, ait passé sous ses yeux. Il y a plus. M. Servaas lui-même estime que certainement les livres auront été vendus à Amsterdam par le libraire Rieuwerts. Comment, dans cette hypothèse (et ce n’est pas apparemment une simple hypothèse), comment être fort surpris du silence de Colerus, lequel ne paraît guère avoir eu connaissance que de la vente de La Haye ? Et à ce sujet, se posent même quelques points d’interrogation qui appelaient de précises réponses. Car pourquoi et comment les livres portés à l’inventaire ont-ils été distraits de la vente opérée à La Haye ? Pour les livres, de même que pour les manuscrits, Spyck avait-il donc été chargé par Spinoza d’une espèce de fidéicommis ? Mais alors, comment ces livres figuraient-ils à l’inventaire où ne figurent pas les manuscrits, quoique livres et manuscrits soient également mentionnés par la Gazette de Harlem ? Si ces livres, ne fût-ce que pour être mieux vendus, l’ont été à Amsterdam, ne l’ont-ils pas été publiquement, et le prix de cette vente, accroissant d’autant la succession de Spinoza, ne devenait-il pas, pour sa sœur Rebecca, l’objet d’une nouvelle et enfin fructueuse saisie ? Ou s’ils l’ont été clandestinement, comment expliquer ou qualifier un pareil procédé ? Ce sont là autant de détails qu’il était nécessaire d’éclaircir ; M. Servaas n’y a pas même pensé.

Quoi qu’il en puisse être, ce qui demeure constant, c’est que Spinoza possédait des livres, et que ces livres formaient toute une partie distincte de l’inventaire définitif qu’avait dressé le notaire Van den Hoven et que M. Servaas nous donne intégralement transcrit ; cet inventaire spécial se terminant par ces mots : Vijf Paccetjes, cinq petits paquets. Ce sont ces cinq petits paquets, qui, peut-être laissés à La Haye comme sans valeur, auraient été, suivant M. Servaas, pris par Colerus pour les livres de Spinoza !

Nous n’avons guère à nous arrêter à la première partie de l’inventaire, dont les divers articles sont compris sous la désignation d’Objets de laine et linge. « Objets de laine : premièrement un lit, un traversin ; deux oreillers ; deux couvertures de lit, dont une blanche et une rouge ; deux rideaux de drap, un rabat et une courtepointe ; un manteau turc noir ; un manteau turc en couleur ; un habit en drap de couleur avec une camisole en cuir ; une culotte fermée en drap de couleur ; un habit turc noir et une culotte fermée turque noire ; un vieil habit de serge ; une paire de bas en sayette noire ; deux chapeaux noirs ; un manchon noir avec une paire de gants ; deux paires de souliers, noirs et gris ; un vieux sac de nuit en étoffe rayée, avec un bonnet ouaté. — Linge : deux paires de draps ; six taies d’oreiller ; deux paquets de linge de corps ; sept chemises, dix-neuf rabats, et encore un