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M. Wingfield avait à ce moment des nouvelles récentes de son frère et le croyait en bonne santé. Cependant il eut après l’apparition le sentiment d’un malheur imminent ; il nota le fait dans son journal, et ajouta les mots : « Que Dieu l’empêche. » Trois jours après, il apprenait que son frère était mort des suites de blessures terribles qu’il s’était faites dans une chute à la chasse.

M. Wingfield donne sa parole d’honneur que les faits se sont bien passés comme il les rapporte. La note qui figure sur son carnet, parmi bon nombre de notes d’affaires, confirme son récit, et sa valeur est grande, puisqu’elle a été écrite après l’apparition et avant l’arrivée de la nouvelle qui s’y rattachait. M. le prince de Lucinge-Faucigny, à qui M. Wingfield raconta ce qui précède quelques jours après la mort de son frère, atteste que ses souvenirs sont parfaitement d’accord avec le nouveau récit que M. Wingfield écrivit plus tard. Enfin le Times et l’Essex independent donnent bien pour la mort de M. Richard Wingfield-Baker la date indiquée par son frère.

Les hallucinations télépathiques paraissent annoncer assez souvent la mort d’un parent ou d’un ami, cependant elles se produisent aussi dans des circonstances moins tristes. Le révérend John Drake, d’Arbroath, en Écosse, était ministre de l’église wesleyenne à Aberdeen, lorsque miss Jessie Wilson, fille d’un des principaux membres laïques du conseil de cette église, partit pour les Indes. Elle y devait rejoindre le révérend John Hutcheon, son fiancé, qui était alors missionnaire à Bangalore. Un matin, M. Drake vint voir M. Wilson à son comptoir, et lui dit : « Monsieur Wilson, je suis heureux de pouvoir vous informer que Jessie a fait bon voyage, et qu’elle vient d’arriver saine et sauve aux Indes. » Après quelques objections de M. Wilson, fort surpris parce qu’on ne pouvait avoir encore aucune nouvelle du vaisseau, M. Drake répondit : « Notez dans votre journal que John Drake est venu vous voir ce matin pour vous dire que Jessie est arrivée ce matin même aux Indes après un bon voyage. » M. Wilson prit note du renseignement qui se trouva littéralement exact. Le vaisseau avait eu bon vent pendant tout le trajet, et il arriva quinze jours plus tôt que d’habitude, le 5 juin 1860.

Ce récit est dû au révérend Macdonald qui le tenait d’une troisième personne, mais en avait eu une confirmation directe par le révérend Drake et par Mme Hutcheon. Une lettre du révérend Hargreave qui répond pour M. Drake, empêché par une maladie, en atteste également l’exactitude. Mme Hutcheon, de son côté, confirme la date de l’arrivée du vaisseau ; elle raconte l’ensemble du fait d’une manière tout à fait concordante, et ajoute que son père