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ce dernier volume que, si ce n’est pas de l’interview, c’est de l’indiscrétion rétrospective, de l’histoire anecdotique, de la description vraie. Les curieux du cabinet de travail de M. Emile Zola, — dont M. Grand-Carteret nous a donné la reproduction dans son XIXe siècle, — ne le seront-ils pas aussi de la « librairie » de Montaigne ou de la « chambre à coucher » de Voltaire ? Quant au petit livre du colonel Hennebert, s’il n’est pas gros, il est plein de choses, et dans un format maniable, en moins de 300 pages, on y trouvera, sur tout ce qui touche à la guerre, — forces militaires, fortifications, moyens de communication, mobilisation, stratégie, tactique, poliorcétique et défense des places, — De ces résumés ou de ces raccourcis dont ceux-là sont seuls capables qui sont les maîtres de leur sujet.

Voyages extraordinaires Voyages involontaires, la féconde imagination de M. Jules Verne ne se lasse pas d’en inventer, et le talent descriptif de M. Lucien Biart en trouve toujours de nouveaux à placer dans le cadre de ses souvenirs. Il y a toute une Amérique, si l’on peut ainsi dire, dont personne, en français du moins, ne nous a donné la sensation comme l’auteur des Clientes du docteur Bernagius. Il nous la donnait hier encore, ici même, et nos lecteurs ne l’ont pas oublié. Dirai-je qu’ils la retrouveront dans les quatre récits, — M. Pinson, la Frontière indienne, le Secret de José et Lucia Avila, — qui forment ce volume ? Ils y retrouveront aussi l’aimable invention de M. Lucien Biart, sa bonhomie doucement ironique, son art de soutenir et de renouveler l’intérêt. Mais s’ils préfèrent peut-être, comme étant plus inédites, en quelque manière, et d’un air plus nouveau, les descriptions de l’Asie centrale à celles de l’Amérique équinoxiale, alors c’est Claudius Bombarnac, le reporter du XXe siècle qu’ils suivront avec M. Jules Verne, de Tiflis à Pékin, par Merw, Boukhara, Samarcande, Kachgar et Lan-Tcheou. Si nous avons l’air nous-même de connaître ainsi le chemin, c’est que le roman de M. Jules Verne est accompagné de deux excellentes cartes. Il est illustré aussi de 6 grandes gravures en chromotypographie, qui nous ont paru d’un effet très heureux, et de 55 compositions de M. L. Bennett.

Sous le titre d’Epis et Bleuets, — pour exprimer le mélange des « idées sérieuses » et des « idées souriantes, » — M. Ernest Legouvé a rassemblé dans ce volume quelques « Souvenirs biographiques, » une demi-douzaine « d’Études littéraires ou dramatiques » et quelques « Scènes de famille. » N’avions-nous pas lu déjà quelques-unes de ces pages ? Peu importe, si nous n’avons pas trouvé pour cela moins de plaisir à les relire. M. Legouvé a beaucoup vu, beaucoup lu, et beaucoup retenu. On sait, d’ailleurs, qu’il conte ou qu’il cause à merveille, légèrement, avec cet air de négligence, ou de nonchalance même, qui était autrefois la coquetterie de la conversation. Point de grands mots, ni d’éclats de voix.