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bénéfice sensible. Ces tarifs les plus bas, elles peuvent les appliquer à des marchandises plus avantageuses à transporter, et il se produit ainsi une sorte de déclassement dont le résultat est d’améliorer le trafic, de l’augmenter et de faire progresser les recettes. D’autre part, les objets qui ont pris la voie fluviale ne pénètrent pas dans l’intérieur du pays sans donner lieu à un supplément de transactions qui entraînent à leur tour un surcroît de production et d’expéditions dont les chemins de fer prennent leur large part.

La compagnie de Paris-Lyon-Méditerranée, à la prospérité de laquelle nous sommes plus que qui que ce soit attaché, ne saurait, par une sorte de privilège à rebours, échapper aux heureux effets de cette loi générale, et déjà maintes fois vérifiée.

Il est du reste une considération qui prime toutes les autres. Ainsi que nous l’avons dit en commençant, l’œuvre dont nous souhaitons ardemment la réalisation n’est point une entreprise locale, mais une œuvre vraiment nationale.

Par suite de la concurrence acharnée que les nations européennes se font sur le terrain industriel et commercial, le bon marché est devenu le principal, pour ne pas dire le seul élément qui puisse dans cette lutte, en assurant les préférences, retenir le succès. Aussi les frais généraux sont-ils partout réduits à leur strict minimum et à peine un perfectionnement est-il découvert que chacun s’empresse de l’adopter. Il en résulte que le coût des matières premières et notamment les dépenses nécessaires pour les amener au lieu de leur transformation prennent une importance croissante dans la détermination des prix de revient, et que le facile placement des produits fabriqués, leur force de pénétration, dépendent surtout des conditions qui leur sont faites par les entreprises de transport, — à la condition toutefois qu’on ne leur barre pas absolument la route par des droits prohibitifs.

C’est ce que les autres pays ont compris. Aujourd’hui les voies ferrées qui aboutissent à Hambourg, à Anvers, Brème, Rotterdam, sont doublées par des voies navigables, et la vitalité de ces ports, leur richesse, en sont sensiblement augmentées. Puis, on l’a vu, l’Allemagne, la Suisse et l’Italie se sont coalisées pour créer des lignes de chemins de fer de trajet plus court et à tarifs moins élevés que la direction Lyon-Marseille. Leurs espérances se sont réalisées : la France a perdu en partie le trafic du nord-est de l’Europe. Il suffirait, pour tout remettre au point, d’employer les mêmes armes que nos voisins. La vallée du Rhône redeviendrait la route la plus économique et de beaucoup la moins longue, en tenant compte de la différence des tarifs applicables à une marchandise voyageant sur rails ou par eau.