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la dépense de combustible des locomotives, qui représentait 8 pour 100 des dépenses totales d’exploitation en 1876, se trouvait ainsi réduite de moitié dix ans après[1].

Maintenant, y a-t-il eu dans l’exploitation du réseau d’État d’autres économies que celles résultant des causes naturelles que nous venons d’indiquer ? À en juger par les attaques de l’opposition parlementaire, et par les critiques de certains journaux spéciaux, tels que l’Économiste allemand, pendant presque toute la durée du passage de M. de Maybach au ministère des travaux publics, c’est-à-dire de 1879 jusque vers 1889, l’exploitation aurait été conduite dans un esprit de parcimonie excessif et avec le seul souci de grossir le produit net, de manière à pouvoir faire parade de gros excédons de recettes. Le personnel aurait été réduit dans une mesure exagérée, l’amélioration et même l’entretien de la voie et du matériel roulant négligés, un certain nombre de dépenses courantes d’exploitation reportées abusivement soit au compte des dépenses extraordinaires, soit à d’autres chapitres du budget général.

Il est certain que l’État n’a pas observé pour lui-même les règles de comptabilité qu’il avait imposées précédemment aux compagnies privées. Les dépenses de gros entretien et de renouvellement ont été imputées au compte dit « extraordinaire » qui est alimenté par l’emprunt. De plus, alors que l’État obligeait les compagnies à mettre chaque année en réserve une certaine somme (qui de 1875 à 1879 a atteint 4.35 pour 100 de la recette brute), en vue de faire face dans l’avenir aux grosses dépenses de renouvellement, il s’est borné lui-même à solder chaque année au moyen de l’emprunt le montant des travaux entrepris dans l’exercice[2]. D’autre part, les frais d’administration centrale et de surveillance administrative ont été imputés à un chapitre spécial indépendant du compte d’exploitation ; enfin, les dépenses résultant des pensions à servir aux anciens agens ont été inscrites au budget du ministère des finances.

Ces procédés ont évidemment eu pour effet de réduire artificiellement la dépense d’exploitation proprement dite, au détriment du compte d’emprunts.

En ce qui concerne les autres griefs articulés contre M. de Maybach, notamment la réduction exagérée des dépenses de

  1. Notons, en passant, qu’en France le prix de la tonne de houille a toujours été beaucoup plus élevé qu’en Allemagne. En 1885, il était encore de 24 fr. 60 sur le réseau d’Orléans et de 25 fr. 90 sur le réseau de Lyon.
  2. D’après l’article déjà cité de M. A. Raffalovich dans l’Economiste, on n’a consacré ainsi de 1880 à 1888 au renouvellement du matériel roulant que 108 millions de marcs, alors que les règles imposées précédemment aux compagnies privées auraient conduit à dépenser ou à mettre en réserve 147 millions, soit 26 pour 100 de plus.