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l’Université, s’exerçait sommairement et sans procédure, sine strepitu et figura judicii, avec appel devant le collège et l’assemblée générale de l’Université. Toutefois, au criminel, le recteur ne pouvait connaître des délits ayant entraîné effusion du sang qu’avec l’assistance du bailli de Dole ; mais le code pénal de l’université était d’une extrême bénignité : le crime de blasphème, le plus grave de tous, n’entraînait qu’une faible amende, 10 sols pour la première fois, 20 pour la seconde, 40 avec trois jours de prison pour la troisième. On ne s’étonnera pas si élèves et maîtres défendirent avec acharnement des droits aussi précieux.

À côté de l’université, pour la seconder et étancher la soif de s’instruire, des écoles ecclésiastiques s’établissent d’un bout à l’autre de la province, à Besançon, Salins, Poligny, Lons-le-Saunier, Saint-Amour[1]. Même dans de modestes bourgs comme Marnay, Pesmes, Gy, des recteurs d’école ambulans ouvrent des cours de grammaire et de latin, tiennent collège ; au XVIe siècle, les jésuites fondent leurs célèbres établissemens de Dole et Besançon, font à l’université une très vive concurrence, encouragés d’abord par les municipalités et les pouvoirs publics qui bientôt s’effraient de leurs progrès ; dès 1614, on s’efforçait de ralentir le mouvement qu’on voulait précipiter en 1582 : « Supplient les dits États vos altesses sérénissimes limiter le nombre des collèges des révérends pères jésuites. » La triple distinction de l’enseignement primaire, secondaire, supérieur, existe en fait, sinon en droit ; dans les statuts synodaux de 1559, on trouve diverses mesures pour l’institution d’écoles dans toutes les paroisses de Besançon ; sous le cardinal de Choiseul, apparaissent les écoles spéciales de filles, même les écoles de hameaux ; ceci, d’ailleurs, se fait un peu confusément, sans ordre, sans méthode, l’autorité et les sujets se souciant médiocrement de l’instruction élémentaire, la théorie de l’État enseignant étant encore inconnue. Au moment même où la Comté se montre sous un nouvel aspect, foyer de culture intellectuelle, foyer de beaux esprits et d’intelligences nourris de fortes études, l’université, qui avait favorisé cette renaissance, commença à déchoir. Une première fois atteinte par l’incendie de Dole en 1479 et par la malveillance de Louis XI, elle est encore menacée de voir s’établir une rivale à Besançon, création poursuivie pendant deux

  1. Voyage en Suisse et en Franche-Comté, par Mme Gauthier. — S. Droz, Histoire du collège de Besançon. — Près de la grotte légendaire des patrons de la province, à Saint-Ferjeux, les bénédictins fondèrent, en 1680, un collège qui dura plus d’un siècle ; il comptait 4 professeurs, environ 40 élèves, et avait 400 livres de revenus à peine. — Estignard, la Faculté de droit et l’École centrale à Besançon. — J. Meynier, les Médecins à l’Université de Franche-Comté. — L. Pingaud, l’École bénédictine en Franche-Comté. — Castan, l’Ecole des Beaux-Arts de Besançon.