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révérences à deux estages… ayant cependant la teste découverte, et faisant bien le marmiteux (misérable). L’advocat, au contraire, les jambes croisées l’une sur l’autre, et se renversant sur sa chaire, advançoit à demi le bras, signifiant qu’il eût à se couvrir. »


III.

Quelles étaient les habitudes de propreté au XVIe siècle ? Sujet délicat et difficile à traiter sans effaroucher le lecteur ; mais, du moment qu’on entre dans la vie privée d’autrefois, la question s’impose, c’est une des moins connues, et, coûte que coûte, il faut l’aborder. L’occasion est bonne, nous avons sous la main les livres de civilité ; essayons donc de nous renseigner le plus discrètement possible. Aussi bien le lecteur est prévenu : s’il a quelque inquiétude, libre à lui de tourner la page.

Nos aïeux de la renaissance passent pour des gens fort malpropres ; c’est une opinion toute faite et j’imagine que le XVIIe siècle en est la cause ; sa malpropreté étant bien avérée, on conclut, sans autre examen, que celle du XVIe siècle son voisin n’est pas douteuse. On cite au besoin quelques historiettes cueillies çà et là, les « discours libres et gaillards » du vieux temps qui disent les choses sans périphrases ; on rappelle certains passages de Rabelais ou de Brantôme, et voilà tout un siècle bel et bien condamné. Si vous le permettez, nous n’irons pas aussi vite en besogne.

Mais d’abord il faut bien s’entendre ; les civilités puériles sont des manuels destinés à l’enfance ; civilitas morum puerilium, dit expressément Érasme qui dédie son livre à Henri de Bourgogne, « entant de grande espérance, » pour en offrir un exemplaire « à tous ses petits camarades. » Une des traductions françaises les plus répandues est celle de Claude Hardy, « Parisien éagé de neuf ans. » Les civilités puériles sont donc les catéchismes du savoir-vivre, que l’enfant doit apprendre par cœur à l’école. Dès lors, tout en donnant des règles de conduite qui serviront plus tard au jeune homme et à l’homme fait, le moraliste est bien obligé de compter avec certaines fautes spéciales aux enfans. S’éplucher la tête pour jeter la vermine sur son voisin, cracher au nez d’un camarade, défaire ses chausses en public, se moucher avec son bonnet ou avec sa manche, sont des gamineries fort dégoûtantes, mais personne ne saurait en accuser la société tout entière.

Commençons par le chapitre de la toilette. Érasme prescrit, « dès le matin et avant toute chose, de se laver à grande eau le visage, les mains et la bouche. » Il est vrai qu’il ajoute : « Le faire souvent