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le remplacer à cause du morcellement extrême de la propriété ; il faut donc cultiver comme le voisin. Assez rares sont les domaines d’un seul tenant, tandis qu’on en rencontre beaucoup qui, avec 60, 80 hectares, comprennent 200, 300, 400 parcelles. Combien, parmi les petits cultivateurs, comptent à leur cote des lopins de 2, 3, 4 ares ! On cherche donc à s’arrondir, et une ambition si légitime atténue dans quelque mesure les maux de cette division à l’infini.

L’élevage du bétail, facilité par les prairies naturelles qui entourent la Saône, l’Ognon, la Lanterne et leurs affluens, voilà pour le cultivateur la véritable spéculation, celle qui ne trompe pas ; le bétail, cette houille de l’agriculteur, permet de payer le rentaire du bailleur, l’épicier, le marchand de vin, d’étoffes, le fisc ; il fait passer les années médiocres, donne un excédent avec les bonnes, excédent grâce auquel on acquittera une dette, on achètera un champ convoité de longue date. Présidens de comices agricoles, économistes, administrateurs, professeurs d’agriculture s’évertuent à prêcher en ce sens, ils ont mille fois raison ; le paysan commence à comprendre, il fait des luzernes, du sainfoin, des prés secs. Sainte Routine recule et serait bientôt vaincue si tant d’obstacles ne surgissaient entre le laboureur et l’aisance.

Dans le Doubs et le Jura[1], le spectacle est un peu différent, et la nature ne laisse pas d’établir ici d’autres diversités. Trois chaînes de montagnes courent parallèlement au Jura principal, déterminant trois zones pour le Doubs : 1o la plaine et le vignoble (200 à 400 mètres d’altitude), compris entre la rivière du Doubs et l’Ognon, avec quelques collines dont les plus élevées, le Poupet, la Roche-d’Or, atteignent 872 mètres ; 2o le premier plateau, 400 à 700 mètres ; son mont principal, celui de Grand-Combe, a 1,081 mètres ; troisième plateau, 700 à 1,700 mètres. Est-il besoin de dire que la première zone est la plus fertile, celle où prospèrent les céréales, la vigne, que dans le troisième d’interminables hivers interdisent le blé, le maïs, même les prairies artificielles ; là un sol profond, argile, calcaire ; ici, une terre légère, franchement calcaire, sans profondeur et souffrant beaucoup de la sécheresse ; là, d’importantes améliorations peuvent et doivent se réaliser : emploi des phosphates, labours mieux réglés, champs à convertir en prés ; ici la nature accomplit la besogne du monta-

    d’agriculture, conseillent de substituer celui de six ans : 1o plantes sarclées ; 2o céréales ; 3o trèfles ; 4o céréales ; 5o fourrages verts, plantes sarclées ou jachère ; 6o céréales.

  1. Afin de ne pas abuser des chiffres, je ne donnerai ici que la statistique agricole du Doubs.