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ignoraient complètement. Quelques condamnations sévères ont mis un terme à ces agissemens. Les dénonciations de vols sont souvent fausses. Les personnes qui ont disposé de sommes qui leur avaient été confiées cherchent à se disculper en disant qu’elles ont été attaquées et dépouillées par des inconnus. Comme remède, on a demandé que celui qui fait une fausse dénonciation puisse être poursuivi.

Le nombre des parjures, des attentats à la pudeur, des outrages aux mœurs, notamment des attentats contre les enfans avec complicité des parens, augmente. On se rappelle à Berlin la sensation que produisit l’affaire du professeur de musique Neumann qui s’était rendu coupable de ce crime sur cinquante de ses élèves.

Les infanticides et les avortemens s’accroissent. La police de Berlin croit que le renchérissement de la vie qui pèse lourdement sur les classes pauvres, qui leur fait redouter une augmentation de famille, y contribue. Le nombre des détournemens opérés par des commis, caissiers ou teneurs de livres grandit également.

Berlin ne semble pas offrir un terrain propice aux escrocs de la haute pègre internationale ; ils s’y montrent rarement et disparaissent vite. Les plus connus dans les dernières années sont les voleurs d’hôtel Ostrowski et l’officier russe Sawine. Ce dernier est devenu célèbre par la façon audacieuse dont, à plusieurs reprises, il s’est échappé de wagon. Il demeura d’abord en 1884 comme prince de Savine, en compagnie d’une belle personne qui s’appelait ou qui se faisait appeler comtesse Megem, à l’hôtel Impérial à Berlin et s’introduisit dans l’aristocratie et la diplomatie.

Saisi en flagrant délit de tricherie au jeu, il parvint à s’enfuir de Berlin, fut arrêté après des aventures romanesques à Genève, livré au gouvernement russe et condamné à six ans de bannissement en Sibérie.

Le jeu de hasard est pratiqué ouvertement aux courses, où fonctionne le pari mutuel. Du point de vue de la police, la tolérance du pari mutuel, malgré un arrêt de la cour suprême reconnaissant à celui-ci tous les caractères du jeu de hasard, semble regrettable. Le fait que la mise du joueur ou de parieur est parfois remboursée avec un bénéfice trente ou quarante fois supérieur exerce un attrait considérable, et il en résulte des inconvéniens nombreux. On a préféré la réglementation du pari mutuel à l’affluence des bookmakers, plus dangereux pour le public et plus difficiles à surveiller. Ceux-ci travaillaient même avec les classes inférieures, parmi lesquelles ils faisaient de nombreuses victimes, et auxquelles on est parvenu à rendre l’accès du totalisateur trop onéreux, en prélevant un droit d’entrée élevé.