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le « représentant » de l’aube, lumière inférieure, ou n’est-ce pas plutôt l’aube qui annonce le jour ?


IV

Si la femme dépasse l’homme par les sentimens affectueux, l’homme semble reprendre l’avantage quand il s’agit de l’intelligence, ou du moins d’un certain emploi de l’intelligence.

La réserve des forces féminines ayant pour principal objet la vie de la race, on comprend que tout ce qui sert à la dépense musculaire ou cérébrale, soutien de la vie individuelle, devait acquérir chez la femme un moindre développement. C’est pour cela que, chez elle, les membres qui accomplissent les travaux extérieurs, puis les viscères thoraciques que ces travaux mettent immédiatement à contribution, sont de taille moindre. Et de même que les membres qui agissent, le cerveau qui les fait agir est resté plus petit[1].

Le cerveau féminin est moins susceptible d’efforts intellectuels prolongés et intenses ; mais la raison en est tout à l’honneur de la femme, puisque son rôle dans la famille implique un développement en quelque sorte indéfini de la vie du cœur et de la force morale, plutôt qu’un développement indéfini de la vie intellectuelle et de la force cérébrale.

Les physiologistes ont d’ailleurs montré que les fonctions qui ont pour but la propagation et la nutrition de l’espèce sont en antagonisme avec une trop forte dépense du cerveau. Le tempérament viril est plus moteur, et la pensée implique un mouvement cérébral qui, pour être invisible, n’en est pas moins pénible. Attaquer un problème pour le résoudre n’est pas moins ardu que d’attaquer un rocher pour le fendre ou un adversaire pour le

  1. Le volume et le poids du crâne ne sont pas tout. D’abord, ils sont en proportion avec le volume et le poids du corps entier (ce dont ni M. Le Bon, ni M. Lombroso ne tiennent compte). En outre, ils sont liés à la quantité du travail intellectuel et musculaire, non à leur qualité, qui s’exprime plutôt dans la complexité des circonvolutions et dans des caractères chimiques ou électriques pour nous insaisissables. M. Le Bon met les Parisiennes « bien au-dessous des Chinoises » pour la capacité crânienne, et il les rapproche des « gorilles. » Nous conviendrons sans peine que les Parisiennes ne se servent guère de leurs muscles et que, dans leur vie trop souvent frivole ou dans leurs travaux plus délicats que pénibles, elles ne font guère de puissans efforts cérébraux ; mais il y a bien d’autres élémens à mettre en ligne de compte. Le cerveau des Polynésiens a une capacité moyenne supérieure de vingt-sept centimètres cubes à celle des Parisiens (hommes) ; cela tient à leur haute stature. Chez les femmes, à une masse organique moindre correspond nécessairement une masse cérébrale moindre. Suivant le docteur Manouvrier, le poids proportionnel du cerveau par rapport au poids et aux dimensions du corps entier est seul intéressant ; or, le poids proportionnel est plus grand chez la femme que chez l’homme. Adhuc sub judice lis est.