Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 120.djvu/217

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


DIVAE. LVCRETIAE. BORGIAE


Oh ! n’avoir pas vécu chez Madame Lucrèce
Dans la docte Ferrare au seuil hospitalier !
Oh ! n’avoir pas servi, triomphant chevalier,
Ces yeux, trônes d’orgueil et miroirs de caresse !

Elle fut la clémente et bénigne maîtresse.
Qui sut goûter le prix du sonnet familier ;
Elle eut les bons rimeurs en souci singulier
Et leur laissa baiser les crins d’or de sa tresse.

L’autel de marbre est frêle et le temps le disjoint ;
Mais pour vivre à jamais, Duchesse, ne crains point
Que les ans ni l’oubli de ton espoir te frustrent ;

Car on t’adore encor par delà le tombeau,
Borgia très divine et très chaste, qu’illustrent
Les chansons d’Arioste et les vers de Bembo.


MARGUERITE DE FRANCE
DUCHESSE DE SAVOIE


Les poètes énamourés
Ont dit la grâce et les mérites
De la perle des Marguerites
Eclose dans les royaux prés.

Tous servaient ses autels sacrés ;
Du Bellay célébrant ses rites
S’écriait : « Venez, ô Charités,
À l’ombre des grands lis dorés ! »

Leurs meilleurs vers étant pleins d’elle,
La princesse, tendre et fidèle.
Les aima comme des amis ;

Et si son nom garde une histoire,
C’est que le grand Ronsard a mis
Un peu d’amour sur sa mémoire.