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de toute innovation. Si l’on avait été d’accord pour faire occuper la haute Birmanie par des forces britanniques, il y avait hésitation sur le système de gouvernement qu’on devait lui appliquer. Il était dans l’esprit du ministre de remettre en apparence ce gouvernement aux mains d’un prince indigène avec toutes les garanties désirables pour sauver le prestige et les intérêts de l’empire indien. On croyait que ce prince serait Nyoung-Yan, un jeune homme de quatorze ans. « Un tel arrangement, a écrit le capitaine Geary, eût eu les avantages suivans : Ne pas augmenter le déficit de l’empire des frais d’une administration européenne ; le pays se fût plus docilement soumis à un protectorat qu’à la suppression radicale que rien n’excusait de l’un des plus anciens trônes d’Asie ; la continuation d’une royauté birmane eût écarté les revendications chinoises ; enfin, dit en terminant l’auteur de Burmah after the conquest, il évitait le rapprochement des frontières anglaises et françaises. » On sait que c’est lord Dufferin, alors vice-roi des Indes, qui leva toutes les incertitudes en faisant afficher ces quelques mots sur les murs de la capitale d’un royaume à jamais disparu : « Par ordre de la Reine-Impératrice, il est notifié que les territoires précédemment gouvernés par le roi Thibô ne sont plus sous ses ordres et seront, pour tout le temps qu’il plaira à Sa Majesté, régis par les officiers que le vice-roi et gouverneur général des Indes nommera à cet effet. »

Un extrait du livre Amongst the Shans, par M. Archibald Colquhoun, trouve également ici sa place ; il témoigne de l’importance que les Anglais attachent à l’intégrité du royaume de Siam, de la pression qu’ils ont dû exercer sur son gouvernement, et, de nouveau, de la sainte horreur que leur inspire, ainsi qu’au grand journal de la Cité, l’idée que nous puissions avoir des frontières limitrophes aux leurs.

« Quoique notre enjeu au Siam, dit M. Archibald Colquhoun, ne soit pas considérable, il est infiniment plus grand que celui de la France. S’il arrive que la vallée du Ménam soit ouverte à nos chemins de fer, que ceux-ci s’unissent à nos voies ferrées de la Birmanie, notre commerce s’accroîtra rapidement. Et même, l’année dernière, grâce à quelques postes policiers placés à la frontière, les voyages par terre ont presque doublé. La protection du Siam est une question vitale pour notre commerce et notre agriculture de la Birmanie anglaise. Une peste épizootique ravage les troupeaux dans ce dernier pays, et notre principale source d’approvisionnement est dans le nombre énorme de bétail élevé dans le Luang-Prabang et autres régions du pays des Shans.

« Si nous ne pouvions reconstituer nos cheptels, notre culture