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du port à une galère du Roi qui vouait de Toulon où la peste était dans toute sa force, alors qu’elle était dans son déclin à Marseille.

La peste, que l’on considérait comme une maladie éteinte, s’est rallumée en ces dernières années dans la Mésopotamie, dans les montagnes de l’Assyr, sur les bords du Volga (épidémie de Vetlianka), à Benghazi, dans la Tripolitaine, dans l’Hindoustan et en Chine.

Depuis 15 ans la maladie s’est deux fois au moins propagée à de très grandes distances, de la province de Bagdad en Perse, et de ce dernier pays jusque sur le cours du bas Volga.

La conclusion à en tirer, c’est qu’il ne faut point se départir d’une active surveillance à l’égard de la peste, d’autant plus que dans la Tripolitaine et au sud de la Chine la peste est limitrophe de nos possessions coloniales. Il est inutile de faire remarquer que les moyens que nous conseillons sont beaucoup plus humains et aussi plus efficaces que ceux dont on vient de lire le récit.

Pour nous en tenir à la Chine, la peste a été constatée dans la province du Yunnan de 1850 à 1878. Elle serait aussi endémique à Pakhoï sur la côte nord du golfe du Tonkin et à Lien-Chu. Elle a été observée également dans l’Hindoustan de 1815 à 1821. En 1830 à Pâli : de là le nom de Peste de Pâli ; et de 1840 à 1880 dans les districts sud de l’Himalaya près des sources du Gange. Les épidémies de l’Hindoustan ont été observées par des médecins. Il n’en a pas été de même pour celles du Yunnan et de la Chine méridionale qui n’ont été vues que par des voyageurs.


VI. — FIÈVRE JAUNE.

On assignait autrefois à la fièvre jaune comme limite le 43° degré de latitude nord, c’est-à-dire une latitude correspondant à l’Espagne et à l’Italie. Or nous avons eu en France, en 1861, une épidémie de fièvre jaune à Saint-Nazaire, qui est à plus de 47°. Enfin la maladie a été importée jusqu’à Brest (48° 1/2), jusqu’au Havre et jusqu’en Angleterre (51°).

Sans donc vouloir nier que certaines latitudes ne favorisent la dissémination de la maladie, on peut voir qu’elles ne sauraient opposer aux effets de l’importation un obstacle infranchissable. Il est à remarquer également que le champ des grandes épidémies de lièvre jaune s’est étendu en même temps que les communications sont devenues plus rapides et plus fréquentes.

Cette observation est applicable à l’Amérique comme à l’Europe. La fièvre jaune, originaire du golfe du Mexique, et qui y restait en quelque sorte confinée comme maladie endémique, tend à prendre de plus en plus, dans le Nouveau-Monde, une extension