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propagé à Bagdad et à Mossoul ainsi qu’aux territoires dépendant de ces deux localités. L’hiver enraya la marche de l’épidémie, que l’on put même considérer un instant comme éteinte ; mais, au printemps de 1890, le choléra éclata de nouveau à Mossoul, et, se dirigeant rapidement vers le nord-ouest, atteignit Diarbékir, puis Orfa, Alep, Hama, Homs et Tripoli, décrivant, ainsi un immense arc de cercle et contaminant avec ; une très grande rapidité une étendue considérable de pays, malgré les plus impitoyables quarantaines que chaque ville, chaque village, chaque hameau, avec une incroyable sauvagerie, établissait pour se protéger.

Au contraire, l’année suivante, au moment des fortes chaleurs, l’épidémie, qui avait disparu pendant plusieurs mois, se réveille à Alep, et de là se propage à Damas, où elle s’éteint sans gagner Beyrouth, bien que, à l’instigation du docteur de Brun, les quarantaines entre Beyrouth et Damas aient été supprimées et remplacées par des mesures plus libérales et plus judicieuses (désinfection). En somme, cette longue épidémie, qui a évolué malgré les mesures quarantenaires les plus rigoureuses et parfois les plus barbares, montre d’une façon péremptoire l’insuffisance absolue, même dans ces régions orientales, des quarantaines de terre, puisque le seul point qui n’a pas été touché est en réalité celui qui n’y était pas soumis.

En présence de pareils résultats, j’estime qu’il y aurait grand intérêt à substituer aux principes sanitaires ottomans des règlemens plus en harmonie avec les notions de prophylaxie internationale et publique admises aujourd’hui. La protection des côtes syriennes est une des questions qui devront être prise en considération dans les prochaines conférences sanitaires ; plus peut-être que les autres nations, la France a intérêt à ce que cette question soit résolue conformément à ses principes et à ses doctrines sanitaires. Il y aura donc lieu d’établir sur ces nouvelles lignes ferrées quelques postes sanitaires bien choisis et de les munir d’un outillage perfectionné ; afin que les appareils puissent être utilisés, il sera nécessaire que la nouvelle administration possède un personnel ferme, compétent et bien exercé.


A. PROUST.