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Chine, le Japon, le Mexique et l’Amérique du Sud, avec lesquels, disent-ils, ce serait établir une communauté d’étalon. Ce n’est pas exact en ce qui concerne ce dernier continent, puisque ce n’est pas l’argent plus que l’or qui forme la base des transactions monétaires de la plupart de ces contrées, mais le papier. En tout cas cette préoccupation nous montre qu’il est nécessaire de considérer ces deux tiers du monde, moins riches et moins civilisés que le tiers vivant sur l’étalon d’or, mais dont l’importance croît de jour en jour et avec lesquels il est de notre plus haut intérêt d’avoir une monnaie commune. Nos fabricans de soies de Lyon se plaignent à juste titre de l’impossibilité où ils sont de continuer leurs affaires avec la Chine et le Japon, en présence des variations de prix du métal argent, dont la baisse constante depuis vingt ans n’a cessé de leur faire subir des pertes d’inventaire. Aux Indes anglaises, où l’expérience de la suppression de la libre frappe de l’argent a été commencée depuis l’été de 1893, il est difficile de juger l’effet que produira cette mesure ; elle peut être le prodrome d’une révolution monétaire dans cet immense empire. Mais l’Asie centrale ne compte qu’en argent ; dans toutes les possessions françaises, Cochinchine, Annam, Tonkin, on ne connaît que la piastre argent. La hausse de ce métal, si elle se produisait aujourd’hui, pourrait avoir des inconvéniens aussi sérieux que la baisse des dernières années. Il ne s’agit point de chercher à relever la valeur de l’argent, mais de savoir s’il est de notre intérêt ou non de continuer à nous en servir dans une partie de nos transactions monétaires. Or comment nous en servir ? Nous n’admettons pas la possibilité d’établir un rapport fixe. Il ne reste plus qu’à permettre aux deux métaux de circuler librement, en laissant à la loi de l’offre et de la demande le soin d’en régler la production dans le monde.


IV

Le problème une fois amené à ce point se réduit aux deux questions suivantes : une de fond :

Y a-t-il intérêt à laisser subsister dans un pays deux monnaies libératoires, or et argent ?

L’autre de forme :

Si on reconnaît utile de garder aux deux métaux leur fonction monétaire, faut-il conserver les anciennes dénominations de franc, dollar, livre sterling, etc., et continuer à frapper des monnaies dans un rapport déterminé, le 1/2 ou 16 à 1, ou bien ne vaut-il