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du village avec ou sans propriété commune, dont les rouages, fonctionnant côte à côte, peuvent même pour nous, observateurs trop lointains, prêter à plus d’une confusion avec ceux de la caste.

Les deux organes constans sont le Chef et le Conseil ou panchâyet. Il y a bien certaines castes dont on nous dit qu’elles n’ont pas de chef, comme les Kâchis à Poona. C’est à coup sûr une exception peu fréquente. Et le confirmerait, ce qui est d’ailleurs apparent, que c’est au Conseil représentatif de la caste qu’appartient l’autorité principale. A vrai dire, c’est dans la caste tout entière qu’elle repose, et cette constitution rudimentaire est singulièrement démocratique. S’il est question d’une juridiction directement exercée et d’amendes prononcées proprio motu par un chef ou son représentant, c’est dans une caste de Jaïnas, essentiellement ecclésiastique, dont le chef est un véritable Gourou, un supérieur de confrérie religieuse, plus qu’un chef de caste. J’ai, pour ma part, peine à croire que, comme Elliot le répète, sans rien affirmer du reste, à propos des chefs de la caste des Banjâras, l’autorité de leurs décisions personnelles ait jamais pu aller jusqu’à infliger la peine capitale.

Ces chefs reçoivent, suivant les classes et suivant les régions, des titres très variés : Mihtar, Choudry, Naïk, Patel, Parganait, Sardar, etc. L’emploi est généralement héréditaire et, à moins de forfaiture qui justifie une déposition et un choix nouveau, se transmet dans la même famille. La caste n’intervient guère par l’élection qu’à défaut d’héritier. faire sur laquelle s’exerce son autorité est variable. Ce pouvoir ne peut d’ordinaire, à cause de la dispersion de la plupart des castes, s’étendre qu’à une fraction plus ou moins large de chacune d’elles ; il n’exclut naturellement pas, dans les circonstances graves, les assemblées plénières. Le chef jouit de privilèges honorifiques auxquels sa femme est associée, et d’avantages matériels, tels que présens, participation à certains revenus, exemption de certaines charges.

Dans son ressort il préside à toutes les fêtes, à celles qui accompagnent les mariages ou suivent les funérailles, à celles qui intéressent le temple du village. Les profits afférens à la fonction font que, dans quelques castes au moins, elle se peut vendre ou engager. Son rôle a quelque chose de patriarcal : il réunit et préside la caste, arrange les mariages, règle en arbitre les cas litigieux. On le voit, chez certaines classes mercantiles, servir d’intermédiaire et de garant dans les marchés. Aussi sa dignité est-elle protégée contre toute désobéissance, tout manque d’égards, par le Panchâyet qui l’assiste.

Il est en effet toujours entouré d’un Conseil d’anciens où les