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LE
MINISTERE DES COLONIES

Nous possédons maintenant, ne disons pas le ministère, mais le droit d’organiser un ministère des Colonies. Les Hollandais en ont un depuis 1834 ; les Anglais, depuis 1854 : soixante ans après les premiers, quarante ans après les seconds, nous arrivons, logiquement, quoique par un détour imprévu, à la solution qu’imposaient l’étendue de notre empire et l’importance de nos intérêts coloniaux. Reste maintenant à créer l’organisme nouveau et à en tirer un bon parti.

Le gouvernement a devant lui une belle tâche, mais lourde. Le moment est critique. Il se prépare, à n’en pas douter, un mouvement dans le pays en faveur des entreprises coloniales. Pour des raisons que sait le monde des affaires, la France continentale est devenue trop étroite ; des débouchés se sont fermés et se ferment encore qu’il sera difficile de rouvrir ; beaucoup de bras sont sans travail ; beaucoup de capitaux sans emploi : une partie en peut être, en devrait être détournée vers les colonies.

Les capitaux d’abord ; car nos colonies sont de telle nature qu’il faut que les capitaux y précèdent les colons.

Prétendre amener aux colonies les capitaux français, cela paraîtra sans doute une chimère. Il dépend de nous que cette chimère devienne une réalité. Ces capitaux, qu’on ne s’y trompe point, ne se défient pas des colonies ; ils se défient seulement du régime auquel les colonies sont soumises. J’en appelle à ceux qui y vivent, qui y plantent ou y trafiquent et je leur demande s’il n’est pas vrai que toute opération coloniale traîne après soi tant