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dinales, bouleversait toutes les analogies qui avaient servi jusque-là à édifier l’optique ; aussi rencontra-t-il de vives résistances ; Arago, qui avait tant contribué au triomphe de la théorie des ondes, dont le nom demeurait attaché à l’expérience qui avait conduit à admettre la transversalité des vibrations lumineuses, Arago refusa jusqu’à sa mort d’accepter cette hypothèse.

Aux contradictions, Fresnel répondit par des découvertes ; du principe d’optique qu’il avait posé, il fit sortir la plus abondante moisson de lois nouvelles qui ait jamais germé dans le champ de la physique : l’explication des phénomènes de polarisation engendrés par le spath d’Islande, les lois de la réfraction et de la polarisation de la lumière par les substances qui appartiennent aux trois derniers systèmes cristallins, le calcul complet des phénomènes de polarisation que déterminent la réflexion et la réfraction par des lames de verre, la théorie des couleurs que les lames cristallisées présentent lorsqu’elles sont examinées entre un analyseur et un polariseur, tels sont les fruits que produisit, en peu d’années, l’hypothèse des vibrations lumineuses transversales.


VII

Les travaux de Fresnel laissaient un point douteux. Prenons un rayon polarisé ; les parties de l’éther que ce rayon traverse sont toutes animées d’un mouvement de va-et-vient suivant de petites droites parallèles entre elles et perpendiculaires au rayon ; parmi les plans qui passent par un tel rayon il en est deux qui sont privilégiés, deux qui se distinguent de tous les autres : c’est le plan dans lequel se meuvent les molécules vibrantes et le plan perpendiculaire à celui-là ; lequel de ces deux plans devons-nous regarder comme étant le plan de polarisation ? la vibration est-elle située dans le plan de polarisation, ou bien est-elle perpendiculaire à ce plan ?

Fresnel admettait que, dans un rayon polarisé, la vibration de Féther est normale au plan de polarisation ; les raisons par lesquelles il résolvait le litige dans ce sens n’étaient pas très convaincantes ; Mac Cullagh en Angleterre et M. F.-E. Neumann en Allemagne proposèrent la solution contraire ; ils admirent que les molécules d’éther qui forment un rayon polarisé se meuvent dans le plan de polarisation ; les motifs qui guidaient leur choix étaient plausibles ; le succès, d’ailleurs, semblait leur donner raison ; par leurs hypothèses sur la polarisation, ils parvenaient à démêler de la manière la plus heureuse les lois compliquées de la réflexion de la lumière à la surface des milieux cristallisés ; Green