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LE
COMTE DE SAINT-SIMON

I. Georges Weill : Un précurseur du Socialisme, Saintl-Simon et son œuvre (1894). — II. Paul Janet : Saint-Simon et le saint-simonisme (1879). — III. Warschauer : Saint-Simon und die Saint-Simonisten (1892).

M. Georges Weill, dans un ouvrage très clair, bien informé, non sans pénétration, vient d’analyser très diligemment les œuvres, assez difficiles à élucider, comme on sait, du comte Henri de Saint-Simon. Il a complété ainsi les travaux si intéressans de M. Paul Janet et de Warschauer sur cette matière. C’est une occasion de ramasser brièvement les principales idées de ce philosophe et d’indiquer les suites qu’elles ont eues après lui.


I

Saint-Simon est un rare exemple d’incohérence dans la vie, d’incohérence dans la caractère, d’incohérence dans les idées de détail, et de fixité dans l’idée maîtresse ; — autrement dit, c’est un fou — très exactement, beaucoup plus nettement que Rousseau lui-même, mais c’est un fou très intelligent, comme il arrive ; qui a eu comme l’intuition de ce qui devait être le plus grand objet des préoccupations du siècle ; et il n’est personne qui soit plus intéressant à étudier. Il est comme un germe. Tout l’arbre est en lui, et l’on ne connaît complètement l’arbre qu’en prenant du germe une connaissance aussi précise que possible.

Incohérence dans la vie. Soldat, et bon soldat, officier et officier de mérite, trafiquant, entrepreneur, agronome, millionnaire oisif,