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avaient été fixées par l’Europe à la conférence de Berlin, en 1885. L’Acte général de Berlin a eu un autre objet : il a créé ce qu’on a appelé le bassin conventionnel du Congo, vaste territoire appartenant à des souverainetés différentes, où il a établi un régime commun, tant en ce qui concerne la liberté du commerce qu’en ce qui touche la navigation des fleuves, la répression de la traite, la neutralité, etc. Les limitations territoriales entre les divers gouvernemens intéressés ont été fixées par des arrangemens séparés, avant et depuis, et c’est une œuvre qui se continue : tout porte même à croire qu’elle n’est pas encore près de se terminer. En 1887, nous avons signé avec l’État indépendant un protocole qui détermine nos frontières sur un point important. Le thalweg de l’Oubangui a été accepté d’un commun accord comme ligne séparative de nos possessions respectives, la rive gauche appartenant à l’État indépendant, la rive droite à la France : toutefois la frontière septentrionale de l’État du Congo ne doit descendre en aucun cas au-dessous du quatrième parallèle nord, de sorte que, lorsque le cours de l’Oubangui s’infléchit au-dessous de ce parallèle, c’est celui-ci qui sert de frontière. Le protocole du 29 août 1887 est d’une clarté parfaite. Pourtant l’État du Congo, plus actif que nous, plus pressé, plus entreprenant, a occupé des territoires qui sont incontestablement sur la rive droite de l’Oubaugui et au nord du quatrième degré. Nous avons protesté dès le premier jour, et il s’en est suivi entre l’État indépendant et nous une longue négociation qui vient finalement d’aboutir à un échec. L’entente entre les deux parties a été jugée impossible.

Nous avons fait alors, un peu tard à la vérité, ce que nous aurions dû faire dès le début. Sur la demande du gouvernement, la Chambre a voté un crédit de 1 800 000 francs destiné à renforcer nos postes dans le haut Oubangui et à en créer d’autres. Nous sommes chez nous dans ces territoires, et il ne faut pas qu’une abstention plus longtemps prolongée permette à l’État congolais de se créer et d’invoquer ensuite une situation de fait supérieure à la nôtre. Au reste, l’Acte général de Berlin, en appelant les divers États possesseurs de territoires dans le bassin conventionnel du Congo à jouir du bénéfice de la neutralité, a fixé d’avance les procédés par lesquels devraient être résolus les conflits à venir : ce sont la médiation et l’arbitrage. M. Casimir-Perier en avait déjà et très correctement accepté le principe ; M. Hanotaux, s’inspirant des circonstances, a fait des réserves en ce qui concerne son adhésion définitive. Il y a toutefois lieu de croire que l’affaire se réglera par voie arbitrale, et cela est à désirer si l’État du Congo ne parvient pas (aujourd’hui mieux qu’hier à s’entendre avec nous directement.

Telle est la première difficulté que nous avons rencontrée, celle qui s’applique à l’État du Congo seul. Mais, quelques jours à peine après la rupture de ses négociations avec la France, le Congo a signé avec l’Angle-