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chiques de tout ordre, et en particulier les défauts les plus caractérisés, comme l’idiotie, la surdi-mutité, bien moins fréquentes dans le sexe féminin, et aussi le génie. Le développement parallèle du génie, de la folie et du crime constitue une des illustrations les plus intéressantes de la tendance à la variation qui caractérise l’évolution de l’humanité, et qui aboutit à une inégalité progressive contre laquelle les lois restrictives de l’individualisme ne sauraient prévaloir.

Les anomalies psychiques sont fréquemment alliées dans les familles et dans les individus avec d’autres maladies du système nerveux, maladies à lésions ou maladies sans lésions connues, les névroses. La fréquence relative des manifestations nerveuses, soit isolées, soit associées aux maladies mentales et à d’autres maladies dont il sera question bientôt est tellement prédominante, que l’ensemble de ces manifestations morbides familiales a pu être désigné sans contestation sous le nom de famille névropathique.

Les maladies nerveuses peuvent se montrer héréditaires, et directement passer du père au fils : on peut citer des exemples de cette hérédité directe pour l’ataxie locomotrice, pour l’épilepsie, pour l’hystérie, etc. ; mais le plus souvent encore, comme dans les psychopathies, c’est l’hérédité indirecte et dissemblable que l’on observe. Les liens de famille entre les maladies à lésions du système nerveux et les névroses s’établissent non seulement par des coïncidences fréquentes chez des parens, mais encore par leurs manifestations chez le même individu, soit en même temps, soit à des périodes différentes de sa vie. Il n’est pas rare non plus de rencontrer, dans l’histoire d’un même malade, des troubles mentaux et des troubles névropathiques ; du reste un certain nombre de maladies comportent ces deux ordres de symptômes.

Le tableau déjà passablement chaotique de l’hérédité morbide serait encore incomplet si on omettait d’ajouter que, parmi les membres d’une famille nerveuse, on rencontre souvent des individus affectés de troubles de la nutrition, goutte, rhumatisme chronique, diabète, maladies héréditaires aussi assez souvent, et qui, autant par leurs allures que par leur parenté, méritent bien le nom de névroses de la nutrition. Et il faut encore noter que d’autres maladies de nature parasitaire ou soupçonnées telles, comme la tuberculose et le cancer, paraissent plus fréquentes dans les mêmes familles. Cette dernière coïncidence peut s’expliquer par ce fait que le système nerveux réglant la nutrition, peut, lorsque son activité est en défaut, diminuer la résistance de l’organisme, et favoriser l’action des agens morbides.

La question de l’hérédité morbide se complique encore par la constatation de deux faits qui sont absolument hors de doute