Page:Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 126.djvu/450

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

En somme, la prédisposition aux maladies peut être héréditaire ou congénitale. Mais la transmission héréditaire n’est pas fatale, et le plus souvent elle est dissemblable, c’est-à-dire qu’elle échappe aux lois normales de l’hérédité. On peut donc arriver à admettre que la prédisposition est due à des conditions très diverses de la nutrition des générateurs. Quelques auteurs ont lié l’idée de dégénérescence à celle d’hérédité et désignent toute une catégorie de malades sous le nom d’héréditaires dégénérés ; mais nombre d’individus, qui présentent les caractères de cette catégorie de malades, ne sont pas des héréditaires. La nécessité de ce lien entre la dégénérescence et l’hérédité doit disparaître avec la notion d’hérédité fatale : on peut être dégénéré sans être héréditaire ; et on peut échapper à l’hérédité morbide.

Les maladies qui ne se développent qu’en raison d’une prédisposition héréditaire ou congénitale constituent des manifestations d’une tendance à la dégénérescence. Morel a montré depuis longtemps qu’une race d’aliénés, quelle que soit son origine, tend à s’épuiser dès la quatrième génération. C’est un fait qu’on retrouve dans l’histoire des autres maladies héréditaires. La tendance à la stérilité est, comme la dissemblance, un indice de la diminution de la vitalité, et on les retrouve réunies aussi bien dans les espèces végétales que dans les espèces animales qui disparaissent. C’est cette diminution de la vitalité qui constitue la dégénérescence ; on la retrouve dans la disparition des variétés qui résultent du croisement de races dissemblables. M. Dixon a fait voir que, comme l’a montré Morel pour les familles pathologiques, les familles de mulâtres disparaissent si elles ne se croisent pas avec des nègres ou avec des blancs ; et la quatrième génération serait aussi pour elles la limite de la descendance. On est donc autorisé à penser que c’est à titre de dégénérescences que les maladies diverses qui ne se développent guère qu’à la condition d’une prédisposition nocive se rencontrent dans les mêmes familles.

La dissemblance qu’on observe dans les familles morbides n’est pas seulement caractérisée par la variété des tendances pathologiques. La prédisposition morbide coïncide fréquemment avec des conditions physiques qui sont de nature à jeter quelque lumière sur sa genèse. Les psychopathies, les névropathies, les névroses de la nutrition coïncident souvent, surtout les premières, soit chez le malade lui-même, soit dans sa famille, avec des malformations congénitales.

Les malformations congénitales sont d’ailleurs assez souvent héréditaires comme les maladies auxquelles on les trouve associées. L’hérédité tératologique comprend des faits très analogues à ceux