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A UN POÈTE


Tâche de ressembler, ô grande Ame blessée,
Toi qui saignes sous les flèches de ta pensée
À ces Saints Sébastiens des fresques, dont les yeux
Regardent le regard du Sauveur dans les cieux
Cependant que leur sang ruisselle sous les pointes.
Des anges auprès d’eux se tiennent les mains jointes
Et leur disent de croire et de savoir souffrir
Pour sauver les bourreaux qui les feront mourir.


Florence.


A UNE VENITIENNE


Quand vous dites les vers de Pétrarque et de Dante,
Votre front se fait grave et votre accent pieux,
Et lorsque vous parlez des exploits des aïeux,
On sent, Théa, revivre en vous leur âme ardente.

Votre Venise antique et sa gloire vous hante.
Temps lointains où battant des ailes en pleins cieux
Le lion de Saint-Marc volait victorieux
Des Alpes à Ravenne et de Candie à Zante.

Ah ! restez bien fidèle à ces deux cultes fiers :
Celui de la patrie et celui des beaux vers,
Aimez les grands héros comme les grands poètes.

Le temps inique a pris à ceux-ci leurs honneurs ;
Aux autres sa main dure a ravi leurs conquêtes :
Qu’ils aient du moins un temple immortel dans nos cœurs!


Venise.


ANDROMEDE


Tordant ses bras meurtris par l’étreinte de fer
De l’anneau qui l’enchaîne à la roche mortelle
Andromède frémit, cependant qu’autour d’elle
La fête de la vie est éparse dans l’air.