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malheureux périt moitié étouffé, moitié brûlé dans ses vêtemens. Trois ans après, en 1857, Khoudaïar fut chassé de Kokan par son frère aîné, Mallah-Khan, qu’il avait nommé, en 1854, atabeg (gouverneur) de Tachkent. Il se réfugia chez l’émir de Boukhara, qui lui confia le gouvernement de Djizak. En 1861, Mallah-Khan fut tué par les Kiptchaks, dont le chef, Alim-Koul, proclama khan de Kokan un petit-fils de Chir-Ali, Chamrat-Khan, ou plus exactement, Chah-Mourad, sous le nom duquel il gouverna. Khoudaïar chercha à profiter de la mort de son frère pour rentrer à Kokan ; mais il fut repoussé par Alim-Koul. En 1862, appelé par les habitans de Tachkent, il s’empara de cette ville, où Alim-Koul vint bientôt l’assiéger. Mais, après une sortie heureuse, il marcha sur Kokan, en chassa Chamrat et remonta sur le trône. Mouzaffar-ed-din, successeur de Nasr-Oullah, le puissant émir de Boukhara, profita de cette circonstance pour envahir de nouveau le Kokan en 1863, sous prétexte de rétablir l’ordre. Il fit Khoudaïar prisonnier et l’emmena à Boukhara. Celui-ci parvint, l’année suivante, à s’enfuir, et se réfugia de nouveau chez les Kiptchaks, où il se mit sous la protection d’Alim-Koul. Ce dernier, dans l’intervalle, avait rétabli sur le trône de Kokan le jeune Chamrat. Mais, le jour même de son entrée solennelle dans la capitale, il s’était pris de querelle avec lui et l’avait tué de sa main. Il le remplaça par un certain Saïd, fils de Mallah-Khan, appelé aussi Tchoullah-Khan (le boiteux), qui fut proclamé sous le nom de Sultan-Saïd-Khan-Ghazi. L’année suivante, en 1861, celui-ci se brouilla avec son protecteur, qui, en 1865, lui opposa un jeune marchand nommé aussi Khoudaïar, désigné dans le pays sous les noms de Khoudaïar-Koullah-Khan, ou de Bilbaktchi-Khan. Mais le terrible chef des Kiptchaks fut obligé en même temps de marcher en personne à la rencontre des Russes qui venaient de faire un grand pas en avant. Il fut battu et mortellement blessé devant Tchimkent. Khoudaïar en profita pour chasser son homonyme, qui se réfugia en Kachgarie après un règne de trois jours, et il remonta sur le trône, pour la troisième fois, en 1865. Il régna paisiblement jusqu’en 1875, après avoir abandonné aux Russes la partie nord du khanat, c’est-à-dire Tachkent et la région voisine.

En 1875, les Karakirghiz se révoltèrent, mettant à leur tête un neveu de Khoudaïar, Nazar-Khan. L’armée envoyée par Khoudaïar à leur rencontre sous les ordres d’Abd-our-Rahman Aftobatchi, fils de Moussoulman-Koul, passa à l’ennemi. Les rebelles marchèrent sur Andidjan, où ils firent prisonnier le fils aîné de Khoudaïar, Nasr-ed-din, qui en était gouverneur. Quelques jours après, ils s’emparèrent par surprise de Marghelan, et