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quelques bonnes dispositions et par-dessus tout l’heureuse idée de livrer à l’imagination des artistes les deux rives de la Seine, pour y établir des constructions diverses et y développer des « ensembles » décoratifs. Il peut sortir de là un spectacle très intéressant et même très beau.

Une autre occasion est offerte de donner satisfaction aux hommes de goût et aux besoins de la circulation. Depuis quelques années le quartier des Invalides s’est beaucoup développé. Des rues, des boulevards autrefois peu fréquentés se sont peuplés de belles maisons, de riches hôtels et, entre le pont de la Concorde et le pont très étroit des Invalides, il n’existe pas de voie entre les deux rives. Le programme imposait aux concurrens la construction d’un pont très large pour réunir l’Esplanade des Invalides aux Champs-Elysées. Ce pont, qui subsisterait après l’Exposition, n’a pas manqué d’attirer l’attention des concurrens, une attention parfois exagérée. Plusieurs en ont fait le pivot de leurs dessins, sans égard pour la vue du fleuve et du paysage qu’ils masquaient ou déshonoraient. Le programme a nettement indiqué l’endroit de l’Esplanade où le pont serait placé, « en face de l’hôtel des Invalides ». Il a paru à plusieurs des concurrens que le lieu était mal choisi, et par là ils se sont mis d’eux-mêmes hors la loi. Pourtant la question est discutable. Nous avons déjà le pont des Invalides qui unit l’avenue d’Antin, rive droite, à l’avenue Latour-Maubourg, rive gauche. Si l’on construit un pont dans l’axe de l’hôtel des Invalides, il sera bien proche du précédent et bien éloigné du pont de la Concorde, il aidera peu à la communication entre les deux rives, il ne sera véritablement utile que pendant l’Exposition. Cependant la rue de Constantine qui longe les bureaux du Ministère des affaires étrangères est une voie de passage très importante et elle va devenir le débouché actif d’une gare de départ pour le chemin de fer de l’Ouest. Qui ne voit que l’ouverture prochaine de cette gare de la rue de Constantine va nécessiter la construction d’un pont dans son axe pour ne pas encombrer le pont de la Concorde, théâtre avant l’heure d’une circulation considérable ? Il semble dès lors que le pont définitif placé à égale distance des deux ponts existans en amont et en aval aurait dû être indiqué par le programme devant la rue de Constantine et non « en face de l’hôtel des Invalides. »

Le rédacteur du programme a obéi à une préoccupation qui a sa raison et son germe dans une pensée très juste et très digne d’intérêt : Rendre à la grande avenue des Champs-Elysées la perspective du royal monument bâti par Libéral Bruant et complété par Jules Hardouin Mansard. La pensée était si naturelle et