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dans des celliers, ou même des pièces susceptibles d’être chauffées pendant les grands Froids ; on aère au contraire, toutes les fois que le temps est doux. Bientôt apparaissent à l’extrémité du tubercule, toujours placé debout, un bourgeon et quelques radicelles : quand le bourgeon est bien développé, le tubercule est bon pour la plantation, qui se fait à la main, le bourgeon dressé. Grâce à cet artifice, le développement est plus rapide, la récolte avancée d’une quinzaine de jours.

On prodigue à cette culture les binages, les sarclages, pour que le sol soit bien ameubli et propre ; on récolte plus ou moins tôt, suivant les besoins du marché, et presque toujours avant la maturité complète. Lorsque les gelées blanches ont sévi, et que les pommes de terre qui ont survécu sont rares, les prix atteignent à la propriété ; de 80 à 90 francs les 100 kilos : naturellement on se hâte d’arracher pour profiter de cette aubaine, et rapidement les prix tombent à 20 ou 25 francs le quintal. A Barbentane, qui est un des centres importans de production, on estime que les dépenses à l’hectare sont de 1500 à 1 600 francs, sur lesquelles le loyer du sol compte pour 100 et même 200 francs. On est satisfait quand l’hectare produit 7 000 kilos : en les estimant en moyenne à 30 francs le quintal, ce serait un produit brut de 2100 francs ; mais c’est là, ainsi qu’il vient d’être dit, une moyenne formée de chiffres très éloignés les uns des autres : les planteurs des Bouches-du-Rhône rencontrent, en effet, sur le marché les produits algériens qui leur font une sérieuse concurrence, puisque déjà au mois de janvier 1895 on a vendu à Marseille des pommes de terre venant d’Afrique ; elles ont atteint le prix exceptionnel de 65 francs le quintal.

Il est bien à remarquer cependant que les pommes de terre de France sont plus délicates que celles d’Algérie et sont en général d’un prix plus élevé.

A mesure que la saison avance, à mesure aussi les expéditions se multiplient et les prix se régularisent. En mai et juin, il part chaque jour de Barbentane à destination de Paris 10 tonnes, de Toulon 20 tonnes, d’Hyères ou Solliès-Pont 25 tonnes. Les prix oscillent de 20 à 25 francs le quintal, soit 200 à 250 francs la tonne. On estime que la région qui concentre ses envois à Barbentane expédie pendant les mois de mai et de juin 4 500 tonnes environ, ce qui représente une somme de 900 000 francs.

Pendant la seconde saison, du 15 mai au 15 juillet, les expéditions pour Paris comprennent de 15 à 20 tonnes par jour ; une bonne partie vient des Pyrénées-Orientales. Le prix n’est plus que de 12 à 15 francs au commencement de cette seconde période et de 8 à 12 à la fin.