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LES REVUES ÉTRANGÈRES

UNE ENQUETE LITTERAIRE ITALIENNE

Alla Scoperta dei Letterati, par M. Ugo Ojetti, Milan, 1895.

Aux dernières pages de son éloquente étude sur les poèmes et les romans de M. Gabriel d’Annunzio[1], M. de Vogüé nous disait sa joie « de saluer en Italie un présage certain de la Renaissance latine ». Et il ajoutait, quelques lignes plus loin : « Je pense à la vieille nourrice, endormie sous ses claires étoiles le long des mers heureuses. Tous nous avons bu à son sein le meilleur de la vie de l’âme, le lait de la poésie, de l’art, de la musique. Sa mamelle paraissait tarie : si elle se gonfle à nouveau, si elle doit encore verser dans nos veines le lait de sa beauté, réjouissons-nous, souhaitons renaissance et fécondité à la nourrice de nos premiers enchantemens ! »

Aucune espérance ne saurait nous être plus chère, en effet, que celle d’un prochain renouveau du génie poétique latin ; et non seulement parce que l’Italie est la nourrice vénérée qui nous a fait boire à son sein « le meilleur de la vie de l’âme », mais un peu aussi, peut-être, parce que nous n’avons pas trouvé dans les littératures du Nord la satisfaction profonde et durable que nous en avions attendue. Il est d’ailleurs trop manifeste qu’un grand silence succède, dans ces littératures, à l’agitation fiévreuse des années passées. Les écrivains anglais s’en vont l’un après l’autre, sans laisser derrière eux personne qui puisse même prétendre à les remplacer. La Russie est devenue si pauvre

  1. Voyez la Revue du 1er janvier.