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conservons comme instrumens de transmission et d’exécution les autorités indigènes.

Si, au contraire, on communique aux puissances la convention conclue entre les Malgaches et la France, si l’on s’en tient pour notre dépendance nouvelle à l’appellation imprécise et vague de protectorat, alors les Français et leurs produits continueront à être traités à Madagascar comme étrangers ; les difficultés seront insurmontables et se succéderont les unes aux autres.

Qu’on y prenne garde : la France a bien des fois péché par légèreté et par précipitation dans sa carrière coloniale récente. Dans le désir de terminer hâtivement une affaire difficile, elle a signé des arrangemens désastreux qui ont été l’origine d’énormes et imprévus sacrifices. Il suffit de rappeler ici le déplorable traité de la Tafna conclu en 1837 avec Abd-el-Kader ; l’opinion publique en France le blâmait hautement ; on le ratifia par lassitude et pour en finir ; ce traité ne finit rien, au contraire, il aggrava la situation et on peut dire que, par ses conséquences, il coûta à la France plus d’un milliard et la mort de vingt mille à trente mille hommes. De même, le traité de 1883 avec la reine Ranavalo constitua une de ces paix boiteuses qui ne terminent rien. De même encore, quoique à un degré moindre, si l’on veut, le traité du Bardo a été l’origine de difficultés incessantes au milieu desquelles nous nous débattons aujourd’hui : quatorze ans après avoir occupé la Tunisie, nous ne sommes pas encore arrivés à constituer la franchise des relations commerciales entre ce pays et la France ; on n’entend pas encore dire que le gouvernement ait dénoncé le traité anglo-tunisien. Que l’expérience de toutes ces fautes nous instruise. Réglons définitivement l’affaire de Madagascar par la seule solution juste et précise, qui est celle que nous venons d’indiquer.


III

Nous nous sommes arrêté longtemps à notre dernière acquisition coloniale et à la définition de la formule qui doit la sanctionner et enlever toute équivoque à notre titre de possession. C’est que, par son urgence, cette question prime actuellement toutes les autres.

Nous voudrions, dans l’espace qui nous reste, examiner rapidement quelques autres sujets qui se rattachent à la colonisation française. Comment devons-nous organiser, d’une part, la garde de nos colonies, d’autre part, l’exploitation ou les premiers travaux de mise en œuvre des énormes régions qui nous sont