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et les dividendes des grandes compagnies ; la seconde, en 1878, quand il a payé, au lieu de les reprendre sans bourse délier, les travaux exécutés par les compagnies secondaires rachetées. Encore n’est-il pas certain que la mesure prise en 1859 ait constitué une libéralité sans compensation ; car si elle a entraîné des charges incontestables vis-à-vis de celles des compagnies qui eussent sombré, et qui ne survivent que grâce à la garantie, elle a, par contre, créé, vis-à-vis de celles qui eussent traversé la crise, une situation favorable au Trésor ; car il est probable que si ces compagnies s’étaient tirées d’affaire par leurs propres forces, on n’aurait pas, depuis lors, obtenu d’elles l’important concours qu’elles ont fourni pour les extensions ultérieures du réseau, et qui absorbe toutes les plus-values de leurs anciennes concessions.

En dehors de ces deux cas, les engagemens du Trésor, lorsqu’ils n’ont pas été la conséquence nécessaire de mesures antérieures, ont eu pour objet unique d’assurer la construction des lignes trop peu productives pour couvrir leurs charges. On peut contester que les moyens adoptés dans ce but aient toujours été les plus avantageux : les concessions faites à des compagnies secondaires, notamment, entraînent le paiement d’intérêts dont létaux dépasse sensiblement celui qui résulterait du crédit de l’Etat, et sont loin de procurer, comme compensation, une exploitation imbue d’un esprit commercial, puisque les conventions n’intéressent qu’exceptionnellement ces compagnies à développer le trafic ; de même, les conventions de 1883 ont, par exemple, accordé à la compagnie du Midi une augmentation de dividende évidemment regrettable. Mais il n’est pas douteux, à travers des erreurs de détail, que la plus forte part, de beaucoup, dans les sacrifices de l’Etat, soit la conséquence nécessaire du développement du réseau. Il est remarquable que les récriminations contre cette situation émanent principalement de ceux mêmes qui ont réclamé ce développement avec le plus d’ardeur.

Dans un prochain article, nous aborderons le relevé détaillé des charges que les chemins de fer imposent au Trésor, nous réservant d’énumérer ensuite les recettes qui en sont la contrepartie. Nous rechercherons, en même temps, les causes économiques qui ont fait varier ces charges et ces recettes dans le passé, et les germes d’augmentation ou de diminution pour l’avenir que renferment les lois et les conventions en vigueur.


C. COLSON.