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déclara cette ville possession italienne. La France, à la vérité, pouvait faire valoir certains droits sur Zoula, car, en 1840, une zone de terrain le long de la baie d’Adulis ainsi que l’île de Dessi lui avaient été cédées par un souverain du Tigré ; néanmoins, satisfaite des avantages que lui donnait la possession d’Obock, elle eut la générosité de ne pas protester et laissa l’Italie s’installer dans la baie d’Adulis. A quelque temps d’intervalle, les tribus qui vivent à l’ouest et au nord-ouest de Kéren, gagnées par les subsides et les cadeaux des gouverneurs de Massaouali, reconnaissaient la suzeraineté italienne ; il en fut de même des tribus habitant au sud et au sud-ouest de Massaouali. Restaient les États du sultan de Rahéita entre Assab et notre colonie d’Obock. L’Italie déclara les comprendre dans sa sphère d’influence, et toute la côte, depuis les limites du territoire d’Obock jusqu’au ras Kassar au midi de Souakim, sur une étendue de 1 100 kilomètres, fut placée sous son protectorat. Au mois de mars 1890, un décret royal organisa l’ensemble des possessions italiennes sur la Mer-Rouge et leur donna le nom officiel de colonie d’Erythrée.

Dès lors une longue bande de littoral italien se trouva interposée entre l’Ethiopie et la Mer-Rouge. Le royaume des négus n’eut plus d’accès vers cette mer. A l’est par l’Erythrée, au nord par la prise d’Asmara et de Kéren, il se trouva enfermé dans un demi-cercle de postes fortifiés occupés par les Italiens. Cerné d’autre part à l’ouest par les États du Mahdi, il n’eut que sa frontière méridionale qui resta ouverte. Mais là encore les Italiens se hâtèrent de fermer cette issue de l’Ethiopie sur le monde extérieur.

La frontière méridionale de l’Ethiopie regarde vers l’Océan-Indien. Entre elle et le littoral se trouvent le pays des Gallas et les territoires de parcours des tribus en majeure partie nomades des Somalis. Divisés en de nombreuses tribus sans cohésion politique, Gallas et Somalis sont constamment en guerre, et leurs frontières sont, pour ainsi dire, dans un état continuel de migration. La côte somâl s’étend, sur l’Océan-Indien, du golfe de Tadjourah, à l’extrémité méridionale de notre colonie d’Obock, jusqu’à l’embouchure de la Tana, sur une longueur d’environ 2 200 kilomètres. Le fleuve Juba, dont le nom revient souvent dans les traités de délimitation conclus depuis quelques années, la divise en deux parties inégales au nord et au midi. Au midi du Juba est le sultanat de Witou, Hohenzollern-Hafen (Port-Durnford) et Kismayou ; au nord, les ports zanzibarites de Rrawa, Merka, Magadoxo et Warsheik, que l’on désigne sous le nom de ports de la côte de Ben-Adir, puis les sultanats d’Opia et de Medjourtines.